• LE SILENCE, CHARME DISCRET DES OPPRESSEURS

    « le Silence des Autres » est un film documentaire sur la loi d’amnistie promulguée en 1977 en Espagne, deux ans après la mort de Franco, et ses conséquences.

     

    En effet , si la fin de la dictature et le retour progressif à la démocratie ont impliqué que sortent de prison les détenus politiques, arrêtés pour simple délit d’opinion, les Cortès(Parlement) ont ajouté un deuxième volet à la loi : l’amnistie AUSSI pour les anciens dirigeants, policiers et militaires  de l’ancien régime. Une « Amnistie générale » destinée à « faire taire les rancoeurs » et provoquer « l’oubli » de cette période sombre, qui a tout de même duré plus de 40 ans…
     

     Or ce vocabulaire, qui n’est pas anodin, est en complet décalage avec la réalité : en 1936/39 suite à la Guerre Civile espagnole, où les Républicains ont combattu avec courage les troupes de Franco qui préparaient un putsch militaire, des milliers de personnes ont été arrêtées, détenues, torturées, éliminées, parfois lors de meurtres collectifs ; et la répression du régime franquiste installé s’est poursuivie régulièrement jusqu’en 1975, forçant des millions d’espagnols à l’exil.

     

     Si la « rancœur » peut concerner des conflits de voisinage, et « l’oubli » des fautes mineures, il ne peut en être question pour des crimes contre l’humanité !

    Nous savons que demander à des victimes l’oubli est une violence supplémentaire insupportable.

    Ce documentaire est le récit du combat contre l’oubli de tous ceux qui n’ont jamais obtenu justice pour eux mêmes ou leur proches décédés.

     

    Trois figures sont marquantes :

     Marià, dont la mère fut arrêtée et tuée par les franquistes dans son village quand elle n’avait que 6 ans, n’a jamais pu récupérer sa dépouille pour l’enterrer décemment. Tous les ans elle fleurit les bords de l’autoroute bétonnée qui recouvre maintenant le charnier. Ses multiples démarches auprès des autorités n’ont eu aucun succès.

     

    Un homme d’une soixantaine d’années à Madrid s’est aperçu qu’il vivait dans la même rue que son ancien tortionnaire « Billy el Nino », tristement célèbre personnage, pourtant jamais inquiété en vertu de cette loi d’amnistie.

     

    Enfin, voici 28 ans, bien après la fin du franquisme, une femme a été victime d’une pratique qui a perduré avec la complicité de l’Eglise catholique espagnole : célibataire, on lui a fait croire que son bébé était mort, pour le faire adopter clandestinement par un couple. Elle recherche son enfant.

    Pour contourner la loi d’amnistie dans leur pays, et faire traduire en justice ceux qu’ils considèrent coupables de crimes contre l’humanité ;pour récupérer et ensevelir dignement leurs morts, toutes ces personnes se battent avec l’aide d’une juge argentine, prête à requérir contre eux. Mais elle se heurte au silence et aux refus de l’Espagne, son action est entravée.

     

    Ce documentaire éprouvant montre l’onde de choc que constitue la violence à la fois pour els intéressés et les générations suivantes. Il nous dit que les propos lénifiants sur « l’oubli » se heurtent à notre soif légitime de justice et de vérité. Une soif insatiable.

     

    Le système a bien fonctionné : interrogés par un journaliste , des jeunes espagnols d’une vingtaine d’années disent tout ignorer des années noires du franquisme et de l’amnistie mortifère.

    Ici en France, malgré tous les efforts faits, 21% des 18/24 ans disent n’avoir pas entendu parler du génocide des Juifs…

     

    Alors, écrivons, sans relâche, contre l’oubli ; informons les jeunes, dans l’espoir que tous ces crimes soient les derniers et ne se reproduisent jamais.

     

    Michelle. C. DROUAULT
     

     Nota : pour les parisiens, le film passe au cinéma l’Arlequin…

     

     

     


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