• Le virus mutant de la domination masculine, 2ème partie

    La notion d’égalité, une manipulation en trompe-l’œil

    Depuis plus d’une décennie, la plus part des décisions des instances d’arbitrage sur l’égalité hommes/femmes ont eu pour résultat d’accorder aux hommes quelques uns des maigres avantages que conservaient les femmes ; ou d’ôter aux femmes les privilèges liés spécifiquement à leur capacité à être mère.

    Ainsi, les femmes ont eu le droit (et souvent l’obligation) de travailler la nuit, alors qu’il est reconnu médicalement que ce type de poste pour une femme enceinte, allaitante, ou mère d’un jeune enfant est hautement préjudiciable à sa santé.

    On a supprimé des avantages de retraite liés à la maternité, pour en donner aux hommes/pères sous certaines conditions ; on a raboté aussi certains avantages fiscaux pour les mères ayant élevé seules des enfants.

    On a accordé aux hommes veufs le droit à la pension de réversion, mais supprimé l’allocation veuvage, qui empêchait de nombreuses veuves sans profession de tomber complètement dans la misère.

    Une décision européenne a accordé à un citoyen espagnol un « temps de disponibilité à l’enfant » en corolaire aux réductions du temps de travail pour allaitement.

    Mais les assureurs, « au nom de l’égalité », ont été contraints de ne plus pratiquer d’abattement sur les cotisations d’assurance-auto des femmes, qui avaient beaucoup moins d’accidents. Au lieu de valoriser la prudence et le civisme des femmes, on les a pénalisées, et les ligues automobiles, où les adhérents sont presque tous des hommes, se mobilisent dés qu’il est question de réduire les vitesses autorisées….

    J’omet certainement des mesures dont je n’ai pas connaissance.

    Mais en attendant, la véritable égalité est un leurre, et l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes en France dépasse encore les 25%, et les obligations des employeurs pour enrayer ce fléau demeurent dérisoires et inefficaces.

     

    Cependant, la plus grande escroquerie intellectuelle au service du pouvoir masculin demeure  la soi disant recherche de « l’égalité parentale ».

    Rappelons que jusqu’à la loi sur l’autorité parentale du 4 Juin 1970 (43 ans seulement !) l’époux et père SEUL avait sur l’enfant tous les droits, représentés par la « puissance paternelle ».

    La mère ne pouvait l’inscrire à l’école, ou décider d’un séjour à l’étranger qu’avec son autorisation écrite. L’enfant relevait automatiquement de l’assurance maladie du père, même si la mère était salariée.

    Jusqu’en 1985 (28 ans seulement !) , le père était seul gestionnaire des biens de l’enfant mineur, au détriment de la mère. Celle ci ne pouvait toucher à un argent qu’elle aurait elle même capitalisé pour son enfant, par exemple, même dans l’intérêt de celui ci.

    La loi sur l’autorité parentale, et celle sur la cogestion des biens de l’enfant ne s’appliquant qu’aux parents mariés, en 1987(loi du 22/7/87) les deux parents non mariés ont la possibilité

    d’exercer en commun l’autorité parentale s’ils en font la demande conjointe devant le juge des tutelles.

    Le balancier était enfin stabilisé.

    La sagesse eut été de ne pas aller beaucoup plus loin.

    Or la loi du 8 janvier 1993, si elle consacre le principe de l’égalité de traitement entre les enfants quelle que soit leur filiation lors des séparations, érige aussi l’autorité parentale conjointe en principe auquel il ne peut être dérogé qu’exceptionnellement si l’intérêt de l’enfant l’impose. *4

    Paradoxalement, c’est à cette époque que se sont développées les formations des policiers et travailleurs médico-sociaux sur les violences conjugales, phénomène jusqu’alors sous estimé et mal connu, sauf par les associations de défense des droits des femmes.

    La délégation aux Droits des Femmes se saisit du problème : une femme en France est tuée par son conjoint ou compagnon tous les deux jours !

    C’est donc au moment où la société réalise combien la domination masculine est violente qu’on répète à satiété cet axiome stupide « le couple parental survit au couple conjugal ».

    Lors d’une séparation, il n’y a plus de couple ! Les parents peuvent garder CHACUN des droits et obligations, mais certainement pas ensemble, et encore moins dans des contextes de violence qui sont si fréquents ! Et dans les meilleurs des cas, parler de couple est préjudiciable à l’enfant qui garde facilement le fantasme de la réconciliation de ses parents.

    Mais peu importe ! On n’est pas à une contradiction prés.

    Les femmes divorcées  ou séparées vont peu à peu commencer à être les otages de leur ex-conjoint, qui, si il est mécontent d’avoir été quitté, ( ce qui est le cas dans prés de 60% des séparations) va utiliser le ou les enfants pour empoisonner littéralement l’existence de leur mère.

    Balbutiantes, les associations de pères se présentent en alliés des féministes et des femmes, faisant croire qu’ils sont prêts à les soulager de cette tâche écrasante qu’est l’éducation des enfants….Que ne le faisaient ils pendant la durée du mariage ? La question reste sans réponse pendant que grand nombre de divorces ont pour cause le délaissement familial de l’époux et père, qui vit sa vie et prend son foyer pour un hôtel, se contentant d’une présence sporadique… les statistiques sur le « partage des tâches » font apparaître de très faibles avancées : 60 à 70% des tâches ménagères et éducatives autour de l’enfant sont assurées par les mères, les pères ayant progressé de 11 minutes par jour en 10 ans ! 

    Mais cette autorité parentale conjointe, là où il y a forcément déchirement, rancune, jalousie, donne une prise formidable à ceux et celles qui n’en finissent plus de se haïr à travers l’enfant. Ils contestent le choix de l’école, des vacances, parfois veulent interdire la fréquentation des grands parents, qui eux aussi saisissent la justice.

     La hache de guerre est déterrée.

    Et au lieu de pacifier la situation, la loi du 4 Mars 2002 va l’envenimer considérablement :

    Elle va consacrer un autre principe : celui de la possibilité de la résidence alternée.

    Oubliant totalement l’idée républicaine fondatrice d’ »intérêt général », le législateur va légiférer pour les classes sociales les plus aisées, la bourgeoisie, qui en imposant son idéologie va provoquer des drames atroces dans les classes populaires, dont les enfants feront les frais.

    En effet la résidence alternée suppose plusieurs préalables :

    -les parents doivent avoir gardé des liens d’estime et de respect mutuel ; ils doivent s’entendre sans conflit sur les règles de vie de l’enfant,

    -les résidences des parents ne doivent pas être trop éloignées, pour la poursuite normale d’une scolarité, et pour éviter à l’enfant la fatigue de transports multiples,

    -les parents doivent bénéficier tous deux de logements suffisamment spacieux.

    -l’âge de l’enfant ne doit pas être inférieur à 3 ans. Jusqu’à cet âge, la stabilité absolue du cadre de vie, et de la personne principale qui s’occupe de l’enfant depuis sa naissance est primordiale. Ce n’est pas une fantaisie, mais une réalité confirmée par l’expérience de la majorité des pédopsychiatres.

    Certains parents plus responsables s’organisent d’une autre manière : ce sont les parents qui viennent à tour de rôle dans l’appartement, et l’enfant ne change pas de lieu.

    Tout ceci suppose des moyens financiers, des facilités, de la disponibilité professionnelle, deux voitures.

    C’est un système qui peut convenir à une élite urbaine aisée. Ceux qui ont les clés, les codes (comme dirait Bourdieu), qui peuvent payer une baby-sitter en cas de problème, ou sauront consulter un médiateur familial si un gros désaccord survient…

    Convient-il aux enfants ? C’est peu probable. Ceux qui sont interrogés se décrivent comme perpétuellement « en transit », ayant toujours oublié quelque chose, avec des existences hachées. Quel adulte, d’ailleurs, accepterait de mener cette vie ? Tous ces bons apôtres de la résidence alternée en ont- ils fait l’expérience pour eux mêmes ? Certains enfants devenus adolescents se décrivent comme des « enfants SDF »….

    Les statistiques sur les parents qui choisissent d’un commun accord la résidence alternée font état d’un revenu moyen de 2163 euros pour les hommes ; 1364 euros pour les femmes.

    Néanmoins, les prestations familiales sont divisées en deux lors de ce type d’arrangement, contrevenant à l’esprit de la loi qui est de corriger les disparités de revenu entre les conjoints pour prendre soin de l’enfant. Les pensions alimentaires versées sont nulles, ou inférieures à 200 euros par mois.  Beaucoup d’avocats ont observé que les demandes de résidence alternée unilatérales n’ont souvent aucun rapport avec l’intérêt de l’enfant, mais surgissent dés qu’intervient une demande de pension alimentaire ! Si le père demeure loin, ou n’a pas l’habitude de s’occuper de l’enfant au quotidien, la mère terrifiée ne demande plus rien : malgré un salaire bien inférieur, elle se débrouillera sans pension, pourvu que son enfant ne soit pas balloté comme un paquet. La résidence alternée est clairement devenue un moyen de chantage.

    Or, la majorité des citoyens français est  actuellement confrontée au chômage, à l’emploi précaire, à la mobilité géographique forcée pour conserver un emploi, aux délocalisations, aux plans sociaux, qui font la une des journaux télévisés. Ils et elles sont en butte aux loyers inabordables, au prix de l’essence, au coût souvent prohibitif de la santé….

    Dans ce contexte, la résidence alternée devient un « cauchemar pour tous » !

    Rendons à nos concitoyens cette justice que la plus part des résidences alternées résultent d’un commun accord….encore qu’il y ait, par suite de chantage ou de pressions diverses, de « faux » commun accord, tout comme il existe des « faux » consentements mutuels, là où un divorce pour faute (violence, maltraitance) se serait imposé.

     Cet accord est explicité dans la Convention remise au Juge aux Affaires Familiales, qui l’entérine, ou peut la modifier.

    Les situations conflictuelles représentent un pourcentage officiel infime des séparations, mais sont montées en épingle par les associations masculinistes « de pères ».

    Et parfois, des magistrats débordés, des avocats lassés, proposent une résidence alternée pour pacifier un conflit, comme si le fait de couper un enfant en deux comme s’il s’agissait d’un bien de consommation pouvait être satisfaisant ! On ordonne des résidences alternées pour des jeunes enfants brutalement séparés de leur mère pour être confiés à un père qui s’est souvent peu occupé d’eux, et peut s’en décharger sur une nouvelle compagne ou une grand’mère.

    Quelques magistrats, campant sur des positions idéologiques, ou totalement inconscients des besoins d’un enfant (ce qui n’est pas rassurant !) ont récemment ordonné par jugement le sevrage de bébés, afin que l’alternance de la résidence puisse être appliquée….

    Cependant, les ravages de la résidence alternée, même au départ consensuelle, commencent à être dénoncés depuis 2004 par des médecins, des pédopsychiatres, et des mères désespérées de voir l’état physique et psychique de leur enfant se détériorer de jour en jour.

    Un certain nombre de pédopsychiatres, alarmés par les dégâts psychologiques sur les enfants qu’ils recevaient en consultation, ont publiquement tiré la sonnette d’alarme, réexpliquant la théorie de l’attachement*5, la nécessité du cadre stable, les conditions d’âge et de résidence impératives pour qu’un tel système soit jouable. Ils le remettent d’ailleurs en question dans son principe, le réservant à des cas très marginaux.

    Pour résumer, un bébé de moins de deux ans ne peut conserver l’image de sa mère que pendant un temps limité, au delà duquel il a le sentiment de l’avoir perdue, et d’être abandonné.(Maurice Berger) Ce qui explique des pathologies psychiques ultérieures ou concomitantes, avec angoisse d’abandon, troubles du sommeil, perte de confiance envers les adultes, et à l’âge adolescent, dépressions chroniques.

    Ce qui est en cause n’est pas forcément un conflit parental, mais des vies morcelées, qui contrecarrent les besoins des enfants jeunes.

    Actuellement, certains enfants en bas âge doivent effectuer des trajets pouvant varier entre 40 et 1300 kms tous les quinze jours pour appliquer une résidence alternée stricte. Nous avons pu lire des témoignages portant sur des enfants de 15 mois, 2 ans, 4 ans, 7 ans…..

    La bonne preuve qu’un père et une mère, ce n’est pas la même chose, c’est que lorsque l’enfant est perturbé, la mère, même si au départ elle était de bonne volonté, veut introduire une certaine souplesse pour essayer de réduire l’anxiété de l’enfant. Et bien souvent, le père refuse, demeurant dans le déni des difficultés.

    Certaines femmes ont l’impression que la résidence alternée est une véritable « arme de guerre », destinée à les punir d’avoir voulu une séparation, dont les enfants font les frais.

    Mais encore une fois, qu’importe !

    La mystification consiste à faire croire que ces solutions violentes pour une majorité de familles, qui n’ont ni le capital économique, ni le capital social et culturel nécessaires pour limiter les traumatismes vécus par les enfants, sont un progrès.

     

    Un pas vient encore d’être franchi avec la proposition de la résidence alternée « par défaut » en cas de conflit ! C’est à dire un perpétuel jugement de Salomon, un enfant clivé, coupé en deux, dont on « jouit », comme d’un bien.

     Une autre disposition, prévoyant l’obligation absolue de communiquer son adresse à l’autre parent quelles que soient les circonstances est plus qu’alarmante : aucune femme ne sera plus à l’abri d’un ex conjoint violent, sous le « prétexte » du ou des enfant(s). Les magistrats français ont d’ailleurs du mal à comprendre le traumatisme que représente pour un enfant le fait de voir sa mère violentée par son père : beaucoup confient encore un droit de visite et d’hébergement à un père qui est un conjoint violent qui a terrifié les enfants, au motif « qu’avec les enfants » , il n’a jamais été violent, et qu’il peut être un bon père !(Pratique qui indigne les magistrats et policiers canadiens)

    Il s’agit encore d’un manque total de capacité d’identification à un enfant comme personne : que diriez vous si on vous enfermait deux jours à la merci d’un agressif violent, que vous avez vu tabasser un ami ou un frère, au motif qu’il n’agresse que les blonds et que vous êtes brun » ?!.

    Cette logique légitime la violence conjugale, comme si elle était particulière, quasi excusable, et n’englobait pas le comportement de la personne toute entière.

    La douleur pour un enfant de voir maltraitée celle qui est son pôle d’attachement est atroce ; elle lui fait de surcroit perdre confiance en son père, elle le remplit de terreur quand il l’approche sans garde-fou. C’est une souffrance dont j’ai été témoin en tant que travailleur social. J’ai vu des enfants confiés pour les week-ends à des pères qui avaient causé à leur mère des blessures graves. Ils revivaient avec acuité les scènes violentes, leur peur et leur impuissance. Souvent, ils étaient malades dès le vendredi soir. Il fallait des expertises psychologiques, des rapports au juge des enfants, avec demande expresse de transmission aux affaires familiales (les juridictions sont très étanches), bref de multiples interventions pour que cesse ce martyr, et ses répercussions sur le plan scolaire et sanitaire.

    Malgré tout cela, la loi s’entête, et se veut « progressiste ».

    POUR QUI EST LE PROGRÈS ? 

     

    Notes :

    * 4 La raison affichée de ce principe d’autorité parentale montre vraiment qu’il existe deux poids deux mesures entre les hommes et les femmes : » les hommes se montreront plus  responsables, ils partiront moins sans laisser d’adresse, si ils ont des droits ! «  Pourtant, pendant des siècles, les mères n’avaient aucun droit, et elles ont été très peu nombreuses, voire rarissimes, à abandonner leurs enfants. De plus cet abandon est deux fois plus mal jugé, et plus mal ressenti par les intéressés une fois adultes.

     

    *5 De par les relations mère/bébé in utéro, au moment de l’accouchement, et au cours de l’allaitement, la mère est la base d’attachement sécure (travaux du pédopsychiatre anglais John BOWLBY,1907-1990 ) qui permet au bébé de s’éloigner progressivement pour explorer le monde( voir aussi S. FREUD, expérience du « for/da)

    Un enfant petit ne s’autonomise que si il est certain de ne pas perdre sa relation avec sa mère quand il s’éloigne d’elle.

    Malheureusement, les travaux de Bowlby, basés entre autres sur son expérience avec des bébés séparés de leurs parents au cours de la guerre de 39/45, ont été détournés, et on en a cité des passages pour culpabiliser les mères qui confiaient leur bébé à une crèche dans les années 70…Pris avec discernement, les exposés tirés des observations de Bowlby sont remarquables.

    La « quantité de présence » n’est pas le facteur prédominant de l’attachement, mais cette stabilité quotidienne de la présence de la mère (même si elle est absente en journée) en particulier le soir et la nuit, avec les rites d’endormissement qui s’y rattachent.

    Voir également les travaux et recherches de Brazelton, et du français Marcel Rufo.

    Tous confirment qu’il existe actuellement une regrettable confusion entre l’égalité du droit au niveau de l’autorité parentale, et l’égalité du rôle au niveau du développement précoce de l’enfant.

     

     

     


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