• Corps brisés, esprits sous influence.

    Dans son homélie de Noël de 2009, Mgr Javiér Martinez Fernandez, archevêque de Grenade

     (Espagne), avait affirmé que les régimes totalitaires d’Hitler et de Staline avaient légalisé des crimes « moins répugnants »que la loi autorisant l’avortement sous certaines conditions qui allait être votée dans son pays.

    Même si nous sommes hélas habitués à ces comparaisons morbides et déplacées ; il convient de clarifier les propos de l’archevêque.

    En effet, le dernier numéro de « Courrier International » traduit un article d’un quotidien italien sur un revirement des soignants au sujet de l’interruption de grossesse, pourtant légalisée depuis 1978 !

    80% des gynécologues refuseraient de pratiquer cette intervention, se basant sur une « clause de conscience » , davantage encore dans la région de Rome.

    Il s’ensuit un nombre d’avortements illégaux(périlleux pour la santé des femmes) avoisinant le chiffre de 40 000 par an.

    Il est évident que L’Eglise tente de terrifier le corps médical et les femmes par de tels oukases.

     

    Les crimes d’Hitler et de son régime sont des crimes contre l’humanité.

    Un crime contre l’humanité consiste en un plan concerté pour éliminer une catégorie entière d’êtres humains POUR CE QU’ILS SONT(Juifs, Tziganes, Bosniaques, Tutsis, etc..).

    C’est la définition officielle.

    Les crimes du régime stalinien sont des meurtres de masse d’opposants politiques, ou supposés tels, et de leurs familles, par la déportation et l’exécution sommaire.

    Si l’idéologie amenant à ces atrocités diffère, elles sont égales en nombre et en horreur.

    Or la suppression médicale, demandée librement par une femme, d’un  embryon de moins de dix semaines situé à l’intérieur de son organisme, et n’ayant aucune autonomie en dehors de celui-ci, ni aucune conscience propre,  ne peut en aucun cas être comparable aux crimes de la Shoah.

    Seuls sont effectivement condamnables comme violences les avortements forcés pour des raisons politiques ou démographiques ; et les avortements sélectifs de fœtus féminins, que nous avons évoqués précédemment. On peut y ajouter les stérilisations forcées.

     

    Les crimes de la Shoah étaient si abominables qu’ils étaient non représentables par l’imagination ; il a fallu des films sur la libération des camps pour que le monde croie à leur véracité. Les images tournées par les nazis eux mêmes se sont avérées plus monstrueuses encore par leur distanciation inhumaine.

    Les  véritables meurtres d’enfants( l’archevêque espagnol emploie délibérément le terme « enfant », comme s’il s’agissait d’enfants de 10 ans avec une conscience et un ressenti), ce sont :

    -l’arrestation des 44 enfants d’Izieu, âgés de 4 à 13 ans, enfermés au fort de Montluc, avant d’être déportés à Drancy, puis à Auschwitz, d’où aucun ne reviendra ;*1

    -les enfants jetés vivants dans la chaux vive parce qu’il n’y avait plus de gaz ZyklonB*2

    -les enfants fusillés au bord des fosses, les bébés fusillés dans les bras de leur mère, par les « groupes mobiles d’extermination » du Reich*.3

    Une liste exhaustive est impossible.

    Dire publiquement qu’une opération médicale consentie-aussi moralement difficile qu’elle soit- est plus répugnante que ces crimes pour lesquels nous n’avons pas de mots, c’est insulter ces petites victimes, ainsi que toutes les victimes des camps d’extermination et de déportation, et des pogroms.

    C’est banaliser et relativiser leurs souffrances. Cela s’apparente à du négationnisme, et devrait être condamné comme tel.

     

    L’archevêque ne s’arrête pas là.

    La deuxième partie de son homélie avait crée le scandale :

    « Tuer un enfant sans défense, et que ce soit sa propre mère qui le fasse ! Cela donne aux garçons une décharge absolue pour abuser  sans limites du corps de la femme (…) »

    Certaines traductions tendancieuses ont présenté cette phrase comme un appel au viol.

    Non, ce n’en est pas un. Mais c’est une justification du viol. C’est la justification de la « punition » des femmes, pratiques barbares allant des coups de fouet pour avoir porté un pantalon, aux viols « correctifs « de lesbiennes, sans parler des viols systématiques comme armes de guerre, qui eux, sont des crimes contre l’humanité.

    Voici les viols de femmes avortées !

    C’est l’éternelle rengaine de la responsabilité des femmes dans les comportements des hommes : si les femmes n’étaient pas si mauvaises, elles ne seraient pas maltraitées …

     

    Un peu plus loin, pour justifier ses propos, le prélat cite l’adage du Moyen Age » seuls les couards s’attaquent aux faibles ». Mgr Martinez ferait bien se s’appliquer cet adage à lui même.

    Il est plus facile de terrifier des femmes dans une église, que de s’opposer à ceux qui commettent de véritables crimes.

    Si cet archevêque est si concerné par le respect de la vie, que ne le voyons nous courir pour demander que s’arrêtent les massacres du gouvernement  syrien de Bachar Al Assad, dont l’armée prend pour cible les enfants ? Amnesty International fait état depuis de longs mois de cas d’enfants torturés à mort, ou arrêtés dans les hôpitaux … Que fait il pour protéger ces innocents ? A-t-il fait une dénonciation publique de cet état de fait ?

     

    Il est temps que les femmes chrétiennes démystifient ce type de discours.

    Pendant que les hommes commettent des violences  incessantes dans le monde entier, dans une spirale de destruction dont nous avons bien du mal à sortir,  en luttant avec les hommes pacifistes et de bonne volonté ; ce sont les femmes qu’on accuse de crimes !! ce sont elles qu’on montre du doigt, elles qui maintiennent la vie au sein de tous les conflits, souvent au péril de la leur ; elles que l’on livre à plus de violences encore en dédouanant ceux qui les commettent !

    ASSEZ .

     

    Michelle Drouault.

     

     

    *1 P.J.Biscarat : « Les enfants d’Izieu, Avril 44, un crime contre l’humanité », Veurey Ceder,    2003

     

    *2 Témoignage de Mme Vaillant-Couturier, rescapée des camps, au procès de Nuremberg 

     

     

    *3 Raul Hilberg « La destruction des Juifs d’Europe », Fayard, 1988, (1ére édition)


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