• La « gestation pour autrui » opère à mon sens une remise en question négationniste de la maternité en général : ce ne sont plus les femmes qui participent de l’ensemble de leur être , physique et psychique, à la création d’un être humain vivant ; il s’agit d’un processus mécanique de portage, qui pourrait être effectué par n’importe quel être biologiquement féminin, et même , disent certains, par un utérus artificiel…

    Tronçonnée, clivée, la « mère porteuse » est sommée de se détacher de son fœtus.

    A-t-elle d’autre choix si elle ne veut pas devenir folle ?

    Cependant il faut une terrible ignorance de ce qu’est la maternité pour imaginer que le fait biologique d’un fœtus composé de gamètes étrangers va empêcher les échanges constants entre la mère et l’enfant. Il faut une pensée magique, une foi en la suprématie des gamètes sur le psychisme humain, qui relève de l’idéologie, et non du réel.

    Ce fœtus, puis ce bébé, comment vit il d’être ainsi porté par une mère clivée qui se force à l’indifférence ? Qui ne tressaille pas à ses mouvements, ne lui parle pas, ne l’imagine pas, ne le projette pas, ne partage pas sa croissance avec son conjoint ?

    Nul ne s’en soucie.

    Nul ne s’en soucie parce que la GPA ne veut pas un être humain créé, mais un produit.

    Or créer n’est pas produire, remarquait Michel Foucault.

    Un produit parfait est exigé, par un contrôle accru sur le corps/réceptacle de la « gestatrice » : on a vu des « commanditaires » aux USA vouloir contrôler le régime alimentaire et les relations conjugales de leur mère porteuse. Et lorsqu’il y a un « défaut » à la naissance, le produit peut être refusé (la mère –gestatrice d’une enfant  trisomique s’est vu refuser la « commande » et a décidé d’élever seule l’enfant, aidée  heureusement par beaucoup de personnes de bonne volonté)

    Donc cette mère doit à la fois se détacher de celui /celle qu’elle porte, mais pour lui, réglementer ce qu’elle mange et sa sexualité et sa vie de couple ; toutes choses qui s’opèrent dans la maternité ordinaire dans un projet commun et une projection familiale.

    A quelle schizophrénie l’oblige-t-on ?

    Le clivage et la dissociation peuvent produire, dans la vie courante, un déni de grossesse.

    La grossesse impensable a pu conduire en cours d’Assises des « gestatrices » de bébés congelés, alors souvent présentées comme des monstres. En fait si au lieu de tuer et dissimuler ces bébés, ces femmes les avaient remis à un commanditaire, auraient elles trouvé grâce aux yeux de certains ? Dans leurs aveux, elles ont expliqué «  ne pas se sentir enceinte ». C’est en partie ce qu’on demande aux mères porteuses. : ne pas se sentir, mais prendre soin de ce qu’on ne sent pas ? Je laisse aux psychiatres le privilège de se pencher sur les conséquences psychiques d’une telle situation.
    Si nous poursuivons la trajectoire d’une maternité ordinaire, la création par les échanges in utéro se poursuit par la création d’un lien continu par l’allaitement. Allaiter est bien autre chose que donner du lait, c’est pourquoi on a peu à peu abandonné l’usage des nourrices, sous l’influence entre autres de Rousseau, précurseur des bienfaits de cette pratique. Elle a été vue comme un progrès considérable pour la santé des mères et des enfants. *

    Dans le cadre de la GPA, l’allaitement est impossible, puisque les « parents d’intention » prennent « livraison » du bébé à la naissance. La mère porteuse doit ainsi, après l’accouchement, faire passer son lait. A moins qu’elle ne le tire pour être donné au biberon par les parents commanditaires. Comment ressent elle cela ? Tirer son lait pour un bébé absent ? (Certes nous sommes nombreuses à l’avoir fait pour les prématurés, mais il s’agissait d’un surplus de ce qui était donné à nos bébés à nous).

    Par un terrible rétropédalage , le lait n’est plus lui aussi qu’un produit. Ainsi les tenants de la GPA ne voient pas qu’ils privent volontairement des enfants d’un lien important : l’enfant-produit n’a pas de lien, on ne fait que lui ajouter éventuellement un autre produit, le lait de la mère désincarné.

    C’est toute cette dévalorisation, cette réduction de la maternité en général, cette dépossession régressive des femmes qui me révolte, autant que la transformation d’enfants en produits commercialisables. 

    Encore une fois, on nous dit « vous n’êtes QUE cela » : objets sexuels, vaches à véler et à traire, nous tombons toujours plus bas.

    Et cela , je ne le veux pas.

     

    Michelle. C. DROUAULT

     

     

    Notes :

     

    *Dans les anciennes générations, certains restaient aussi attachés à leur nourrice qu’à leur mère, celle-ci n’ayant pu s’empêcher de donner son amour avec son lait ; beaucoup avaient des « frères ou sœurs de lait » envers lesquels il existait un empêchement de mariage.


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    Dans notre dernier article, nous avons émis l’idée que les magasines dits « féminins » étaient de manuels de soumission dévoués au patriarcat, dont la mission est de montrer aux femmes comment s’adapter aux besoins et désirs des hommes d’une époque donnée.

     

     Utilisant un langage et des codes « modernes », ils tentent d’attirer des lectrices dés le plus jeune âge. Dans quel but ?

    Ces hebdomadaires contribuent d’abord largement aux profits d’entreprises et de groupes internationaux puissants : industrie du cosmétique, de la para- pharmacie ; du prêt à porter ; de la parfumerie et du luxe-maroquinerie bijouterie accessoires-.

    Ces groupes étant dans leur écrasante majorité dirigés par des hommes, un double objectif parallèle est poursuivi : faire d’énormes bénéfices tout en gardant les femmes soumises.

    Des articles « légers » mais au ton très directif (le mode impératif est typique de ces magasines) appuyés par des publicités pour tous ces produits industriels, montrent aux femmes et aux jeunes filles quelle est l’image qu’elles doivent atteindre, le comportement qu’elles doivent adopter, pour être un objet désirable. JAMAIS un sujet désirant.

    L ‘apparition éphémère , dans les années 80 d’une presse résolument axée sur les luttes de femmes, et dirigée par des femmes( Des Femmes en Mouvement, Cahiers du Féminisme) a eu un simple effet de saupoudrage : afin de ne pas paraitre « ringarde », la presse féminine a du faire mine de soutenir quelques combats : IVG,  salaires et emploi des femmes. Car contrairement aux années 50/60 la majorité des lectrices travaille et s’informe.

    Cette presse est un exemple frappant des liens étroits entre l’économie, la consommation et l’idéologie véhiculée par la société.

    Voici 50 ans, on publiait une littérature destinée à formater les ménagères consommatrices d’appareils électro ménagers dont la société des Trente Glorieuses avait besoin pour relancer l’économie. (Moulinex libère la femme !)

     L’hostilité moderne au voile ou au foulard, bien largement relayée par cette presse, est elle due en partie à une moindre appétence de certaines femmes et filles musulmanes pour beaucoup de produits vantés, vêtements, fards ou produits capillaires ? A présent qu’il s’est crée une industrie de la mode et des cosmétiques pour femmes musulmanes, la question semble devenue mineure…

     

    Une des industries qui génère actuellement le plus de profit est l’industrie de la pornographie.

    Grâce aux nouvelles  technologies elle est massivement diffusée, et générerait entre 3 et 5 milliards de chiffre d’affaires par an ! Son influence est exponentielle puisque, d’après un chercheur canadien en sociologie, il existerait 1800 fois plus de pages « pornos » sur le Web que voici 5 ans. Et 25% des recherches en ligne auraient pour objet des images ou sites pornographiques. La fortune des dirigeants de Google ou Apple n’est pas un secret.

    Il n’est donc pas étonnant que les magasines « féminins » contemporains qui ne peuvent exister sans le soutien des industries, diffusent sans états d’âme des recommandations et des pseudo « tests », visant à déterminer des normes sexuelles liées à l’imagerie pornographique.

    Les tests sont une manière subtile-ou grossière- d’imposer des modèles.

    Des tests inclus dans des revues pour très jeunes filles visent, depuis de longues années déjà , à évaluer la capacité d’une jeune fille de donner du plaisir à un homme, sous le prétexte d’avoir elle même une sexualité épanouie. La supercherie est que cet épanouissement est censé passer par des » performances » reliées à des images et fantasmes pornographiques totalement androcentrés-je devrais dire phallocentrés-

    Un chercheur québécois a trouvé dans un magasine pour jeunes filles « Adorable »( !) un test intitulé « quelle salope êtes vous ? ». On peut être une « super salope », une « salope normale », ou une « coincée »…

    Cette propagande normative touche le manque de confiance en elles de nombreuses jeunes filles, qui croient de bonne foi qu’apprendre des « techniques » va les faire apprécier et aimer.

    Quand on sait que 51% des garçons en France ont consulté au moins une fois un site pornographique dans l’année et qu’il n’existe dans notre pays pratiquement aucune éducation à la sexualité et aux relations affectives dans les collèges et lycées, on aura compris que la pornographie facilement accessible(aisé sur un smartphone) s’est engouffrée dans cette faille pour remplacer l’éducation .*

    Quant aux parents ils semblent malgré tous les discours tonitruants de « libéralisation » des mœurs », mal à l’aise avec leur propre sexualité au point de refuser d’aborder le sujet de manière générale avec leurs enfants, pour les préparer sereinement à leur vie d’adulte.

    Le problème est que , comme le définit très bien l’auteure américaine Catherine Mc Kinnon, le sujet de la pornographie n’est pas la sexualité , mais la domination. La domination de mâles sur des femmes et des filles proies consentantes qui aiment l’humiliation. C’est cette humiliation qui leur procure à EUX une jouissance sexuelle. Mais elles n’en retirent qu’au mieux une excitation trouble, au pire la souffrance d’être traitées en objet, et une douleur physique.

    « Les corps des femmes ne sont pas des biens publics », a dit une ministre pour contrer le harcèlement de rue. Elle a raison. Mais nombre de jeunes hommes le croient.

    Ils harcèlent les filles et les femmes beaucoup plus fréquemment et violemment qu’autrefois.

    On lit souvent des récits d’agression où l’homme (souvent jeune) « n’a pas supporté » qu’on refuse ses avances. Evidemment. La pornographie montre des femmes toujours prêtes.

    Il semble que dans un quartier où j’ai travaillé 15 ans dans ma jeunesse sans avoir aucun problème, il soit dorénavant difficile de se promener en jupe, alors que la population n’a pas changé. Comment en est on arrivé là ?

    Cette situation profite aussi aux professionnels de la pornographie, aux proxénètes toujours disposés à fournir aux clients de nouvelles femmes pour de nouveaux besoins ; aux pédophiles, aux cercles mafieux. Est ce bien cela que nous voulons ?

    Et plus la riposte des femmes et des féministes est énergique, plus la résistance violente s’organise, car trop d’intérêts sont en jeu.

     

    Reste à comprendre pourquoi les responsables religieux des trois monothéismes ne saisissent pas ces enjeux, et s’opposent unanimement à l’enseignement de la base du respect mutuel entre les sexes, et de leur égalité. Dés qu’on parle d’une éducation à la vie affective et sexuelle, c’est le tollé, orchestré par des associations souvent extrémistes.

    Or demander l’ignorance programmée des enfants , c’est les livrer à une « éducation » par ces images violentes, car les adolescents chercheront toujours bien légitiment  des réponses à leurs questions.

    Ce mélange détonnant d’indifférence gênée de l’école, de mutisme des parents et de pornographie facile sur fonds d’interdits religieux absurdes, est en train de faire de la vie de nos filles et nos petites-filles un enfer dans des sociétés qui régressent.

    Pour ceux qui défendent avec ferveur le « droit à la vie » , ne commence t-il pas avec le droit à une vie sûre de celles qui la donnent ?

    Alors je le redemande, quand les religieux vont ils renoncer aux quelques privilèges accordés par le patriarcat, pour tendre la main aux féministes afin de combattre ces fléaux, et aider à faire advenir la société solidaire et généreuse qu’ils disent appeler de leurs vœux ?

    Quand les responsables religieux, au lieu de s’adresser aux femmes pour réglementer leurs choix, vont ils s’adresser aux hommes pour leur demander de respecter la dignité des femmes et des enfants ? C’est à ce seul prix que l’humanité progressera.

     

     

    Michelle. C .DROUAULT

     

     

     

    *Au milieu de cette déferlante d’images pornographiques, le clitoris des femmes n’a été dessiné et explicité clairement dans les manuels scolaires français que cette année ! C’est à dire que l’organe féminin de la jouissance était nié aux adolescents. Tout un programme….

    « l’excision mentale » des femmes occidentales dénoncée par l’Egyptienne

    El Sadaoui serait donc véridique.

     

     

     

     

     


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  • Les femmes font sans cesse l’objet d’injonctions contradictoires. Ces injonctions peuvent varier d’une époque à l’autre ; d’une culture à l’autre.

     Or, le harcèlement est justement caractérisé par une série d’injonctions contradictoires impossibles à satisfaire, qui mettent en situation de stress.

    Les femmes seraient elles harcelées en permanence ?

    Récemment aux Etats-Unis, a été ré-affirmée l’interdiction pour les femmes d’assister bras nus aux séances de la Chambre des Représentants.

    Pendant ce temps, en France, certains édiles persistent à braver le Conseil d’Etat pour empêcher les femmes qui le souhaitent de venir à la plage habillées.

    Et dans le même temps, des Algériennes ont  revendiqué de pouvoir se baigner en bikini sans subir l’opprobre et les persécutions des hommes.

    Avant d’être relaxées par le tribunal sous la pression de groupes féministes, les FEMEN ont été inculpées d’exhibition sexuelle juste parce qu’elles avaient manifesté (comme de coutume) seins nus.

    Parallèlement, la pornographie et la publicité montrent sans cesse des morceaux de corps de femmes dénudés et chosifiés. Mais lorsque ces mêmes groupes protestent contre ces images, ils sont traités de « puritains ».

    On encourage l’allaitement maternel, mais beaucoup sont encore choqués si une femme allaite en public. C’est bien dans les fantasmes des hommes que les seins sont érotisés, et perdent leur fonction d’organe de nourrissage des nouveaux nés

    La liste des injonctions contradictoires reçues serait longue et fastidieuse..

     

    L’auteure Geneviève Fraisse, historienne de la pensée féministe, nous donne une piste d’ explication.

     Partant des théories de l’anthropologue Lévi-Strauss selon lesquelles les femmes auraient été dans de nombreuses ethnies une monnaie d’échange, elle pense que les femmes sont plus que cela :un MOYEN d’échange, un signifiant ; le discours sur elles étant pour les hommes une façon de se dire quelque chose ENTRE EUX.

    Mais les femmes ne sont pas censées exister par elles mêmes. Jamais.

    Cela semble exact si on considère la récente obsession du couvrir/découvrir les femmes à la fois en Orient et en Occident. Serait ce une balle que se renvoient les sociétés à domination masculine (à des degrés divers, visible ou camouflée) exprimant par des oukases sur les codes vestimentaires féminins des formes de pouvoir : colonialiste(France, Belgique) ; anti-impérialiste et nationaliste(Iran, Algérie) ; tribal(Arabie Saoudite) ?

    Il circule quelque chose du discours politique au travers de prétextes idéologiques/et/ou religieux divers et variés, assignant à « LA » femme une apparence précise, icône de la République ou symbole d’une pureté identitaire fantasmée.

    Où est donc notre propre , notre véritable image ? Multiple et insaisissable, elle fait si peur qu’il faut vite la faire disparaître….

    Pour les dictateurs Argentins les femmes de gauche, les femmes « révolutionnaires » qui luttaient pour une vie plus juste pour tous, n’étaient que des putains et il était justifié de les tuer et de leur enlever leurs enfants. L’Iran a exalté les femmes révolutionnaires en tchador, « gardiennes » d’un ordre social nouveau, qui leur a peu à peu ôté beaucoup de droits

     fondamentaux.

    Toutes les représentations qu’on nous somme d’intégrer sont masculines. Nous en écarter pour être enfin nous mêmes sera un long combat. Depuis « On ne nait pas femme, on le devient » de S. de Beauvoir, le questionnement n’a pas cessé. Et le harcèlement pour que nous abdiquions notre intelligence et notre esprit critique persiste, voilant d’un écran de fumée les raisons qui feraient qu’une même attitude serait licite ici, illicite ailleurs…

     

    Les magasines féminins européens et occidentaux sont particulièrement emblématiques  des injonctions faites aux femmes : amantes la nuit ; épouses, mères et ménagères le soir et le week-end, travailleuses dans la journée. 70 heures de travail par semaine au bas mot, avec obligation de jeunesse éternelle, de jouissance obligatoire pour satisfaire l’égo  masculin ; sans oublier la rentabilité économique pour payer les crédits du foyer…

    Ces hebdomadaires sont de véritables manuels de soumission. Une soumission qui se transforme avec les époques, mais elle paraît n’avoir jamais été si complète.

    Dans les années 50-75, selon les classes sociales ciblées, ils étaient remplis d’images de mode, de recettes de cuisine ou de beauté.  L’objectif étant toujours de « garder » à tout prix un homme intrinsèquement volage. ( qu’on se souvienne de l’ironique chanson de J. Gréco : celles là auront appris/la cuisine/qui retient les petits maris/ qui s’débinent).

    L’objectif est toujours identique, mais une partie des recettes sont à présent des recettes de sexe. Les besoins affirmés des hommes ont varié ; c’est ce que ces manuels de dressage sont chargés de bien faire comprendre aux lectrices. Le rôle des femmes n’est que l’adaptabilité aux besoins masculins, pas à leurs besoins propres.

    Ces dernières années, en feuilletant quelques uns des magasines plus populaires, j’ai pu lire des phrases comme : »Négociez du fast-sex une fois par semaine ( !) » ou «  La fellation est maintenant le passage obligé de toute relation », extraits que je vous livre sans commentaires.

    Les femmes qui lisent cela se croient elles « libérées » ? Il n’est pas question de sexualité épanouie mais de service sexuel.

    Cependant la mystification fonctionne. Il est risible de voir les lectrices des mêmes magasines  s’insurger contre certains codes vestimentaires-dans les pays démocratiques- et les déclarer marque intolérable de soumission aux hommes, comme si les femmes de culture occidentale n’étaient soumises à rien !! Elles le sont AUTREMENT. C’est tout.

    Donner des recettes de sexe pour satisfaire le mâle est pire que donner des recettes de cuisine, car l’intégrité du corps est atteinte. Les deux phrases citées plus haut signifient : « laissez vous violer, vous aurez la paix ». Ni plus ni moins. Mais les pages sont saupoudrées d’articles sur l’excision  en Afrique ou le système de dot en Inde, pour bien montrer que les aliénées, ce sont les autres…L’auteure égyptienne Nawal  El Sadaoui évoquait d’ailleurs « l’excision mentale des femmes occidentales », c’est à dire leur incapacité à définir leurs besoins et désirs  propres et de les satisfaire

    Nous sommes toutes égales devant l’adaptabilité forcée aux besoins d’une catégorie d’hommes qu’on nous impose : avoir une femme « sexy »/ ou invisible aux autres ; pour soi tout seul /ou vendable à d’autres.

    Nous sommes toutes encore des marionnettes. Nous aurons à nous transformer en guerrières pour imposer à notre tour d’être des sujets pensants parlants, autonomes ; et non des instruments.

    Certains hommes sont à nos côtés, mais si peu nombreux…

     

    Michelle C. DROUAULT


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    Un récent reportage intitulé « Femmes invisibles, femmes de la rue », évoquait la vie éprouvante des femmes sans domicile dans les grandes villes, de plus en plus nombreuses.

     

    Ce qui frappe, c’est ce paradoxe : la violence familiale est souvent ce qui a conduit ces femmes à la rue ; et c’est un lieu où elles doivent encore redouter la violence.

     

    C’est à dire que pour les femmes il n’existe pas d’« endroit où reposer sa tête », la violence est partout , à l’intérieur/à l’extérieur et semble douloureusement inhérente à la condition de femme.(alors que pour un homme elle est affaire de situation)

     

    Pour éviter les agressions ou les mauvaises rencontres, certaines femmes marchent plusieurs heures par nuit, et ne se laissent aller à dormir que dans la sécurité de centres d’accueil de jour.

     

    Plusieurs d’entre elles disent avoir perdu la garde de leurs enfants, et être empêchées de les voir par leur père. Certains diront que les problèmes d’alcoolisme ou de drogue ne facilitent pas les relations parentales, mais est il possible de « tenir » dans la rue sans stimulants pour vaincre le froid et l’angoisse ?

     

    On les voit mendier-et il faut énormément de courage pour mendier- s’offrir le répit d’une douche ou d’une halte dans un dispensaire.

     

    L’état des pieds des personnes à la rue est toujours dramatique. Une collègue avait un jour accompagné un homme à la rue dans un dispensaire où on a découvert que le tissus de ses chaussettes incrusté dans la chair  avait causé une infection. « Ce sont les pieds qui voyagent » dit pudiquement une dame en errance.

     

    Cela fait plus de 10 ans que le « 115 », numéro permettant d’avoir une place d’hébergement pour la nuit, est perpétuellement saturé, et dysfonctionne.

     

    Alors dans les villes, les sans domicile se font toutes petites, se glissant dans les garages, les halls, d’où il faut décamper dés les premières lueurs de l’aube.

     

    Certaines femmes vivant dans des locaux de fortune, voiture ou baraquement, ont un emploi. Leurs collègues ignorent leur situation dont elles ont honte. D’autres encore ont été enceintes et à la rue.

     

    Pourtant AUCUN candidat à l’élection présidentielle ne prévoit de programme visant à éradiquer les violences familiales et les violences sociales dont sont victimes les femmes, et qui sont étroitement liées. Aucune ambition n’est affichée dans ce sens.

     

    Quelle est l’espérance de vie des femmes en errance et en souffrance ?

     

    Combien sont elles à accepter de guerre lasse un hébergement contre des relations non consenties, et à disparaitre ainsi des regards ? A finir sous la coupe d’un proxénète ?

     

    Ces interrogations sont laissées aux bons soins des associations caritatives, que la société tolère du moment qu’elles n’affirment pas l’égalité de tout être humain devant le besoin, et qui évitent de facto des troubles et revendications sociales trop importants.

     

    Pendant que media et réseaux sociaux s’alarment de l’invisibilité des femmes sur un catalogue d’IKEA, nul n’entend les voix des femmes de la rue. Elles ne votent en général pas, et qui dit sans domicile veut souvent dire sans domiciliation, donc sans aides ni minima sociaux.

     

    Lorsque des films de fiction parlent du drame de la rue, ils mettent en scène des hommes, double invisibilité.

     

    « Ne lâchons rien »disait l’Abbé Pierre. N’abdiquons pas notre capacité d’indignation et d’interpellation.

     

    Michelle C. DROUAULT

     

     


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     L’Eglise catholique nous fait honte. Elle défend en ce moment le mensonge et la manipulation.

    J’ai nommé les sites anti-IVG qui se font passer pour des sites officiels d’information, et trompent des femmes et des jeunes filles déjà aux prises avec une décision difficile.

    Dans une société démocratique, chacun est libre d’être pour ou contre l’interruption de grossesse pour soi même, et d’exprimer son opinion.

    Mais la lâcheté qui consiste à avancer masqué et à ne pas afficher ses opinions pour tromper les femmes et les empêcher d’avoir recours à une IVG tant elles deviennent inquiètes et terrorisées par les fausses informations qui leur sont données, doit être sévèrement condamnée.

    Les femmes journalistes ou élues (Aurore Bergé, députée LR, entre autres) qui ont « testé » ivg.net sont formelles : aucun véritable soutien n’est proposé ; aucune information médicale fondée n’est fournie. Seules sont énoncés des constats fantaisistes et lapidaires (ex : « les couples ne s’en remettent pas »).

    Par ailleurs, il semble qu’un « hameçonnage »  soit pratiqué pour obtenir les coordonnées des appelantes. La plupart des femmes croient de bonne foi avoir à faire à une organisation officielle. (il y a un numéro vert)

    C’est uniquement CE DÉLIT DE TROMPERIE qui est en cause. Pas autre chose.

    Il est justement nommé « délit d’entrave à l’IVG ».

    Aucune censure n’est exercée sur des sites qui annonceraient clairement que l’IVG ne leur paraît pas toujours une bonne solution et qu’il existe des alternatives.

    La Conférence des Evêques de France prend les femmes pour des idiotes qu’il convient d’influencer par de semblables supercheries.

    Si débat il doit y avoir sur l’IVG, ce n’est certainement pas à des hommes célibataires et sans responsabilités de l’initier, mais aux femmes elles mêmes.

    Nous attendons la CEF sur la véritable défense des faibles : les enfants d’Alep ; les enfants victimes « collatérales » des violences conjugales (73 enfants orphelins de mère ; 35 tués avec leur mère …).

    Nous souhaitons qu’elle remplisse les églises par un message de confiance ; et pas qu’elle les vide par de tels agissements indignes de chrétiens.

     

    Michelle. C. DROUAULT


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    En Septembre dernier, les internautes norvégiens ont pu découvrir un blog bien insolite :

    Tout en rose et blanc, c’est celui de THÉA, 12 ans, qui annonce « Je m’appelle Théa, j’ai douze ans, et je vais me marier dans un mois ! »

    Suivent des photos des préparatifs, qui semblent amuser et émerveiller l’héroïne : bague de fiançailles, alliance, bijoux, maquillage, essayages de la robe de mariée, faire parts….c’est là que le malaise s’installe : le futur marié, GEIR, est âgé de 37 ans, et Théa ne le connaît pas, elle ne l’a encore jamais rencontré ; elle a juste vu des photos.

    Entre les pages euphoriques, se glissent des questions inquiétantes : Théa n’aura plus besoin d’aller à l’école, ni de travailler plus tard : son mari gagne assez d’argent pour deux….bien sûr, elle devra dormir avec lui : devra-t-elle avoir des relations sexuelles avec lui ?.. pour le moment, elle dort avec une peluche !.Suit le catalogue de lingerie « sexy » pour la nuit de noces, que la jeune fille dit consulter, et nous voilà de plus en plus mal à l’aise.

    Enfin, voici la vidéo du mariage à l’église. La petite mariée de douze ans entre, tremblante, seule dans l’église où son mari l’attend à côté du prêtre.

    Mais au dernier moment, lorsque celui-ci lui demande si elle veut bien prendre pour époux Geir, Théa secoue la tête et répond : « Non ! »

     La caméra se dirige alors vers l’assistance : des manifestants brandissent des pancartes »NON AUX MARIAGES FORCÉS ! » : Il s’agit d’un vrai-faux mariage.

     Les fiancés sont en fait une apprentie comédienne et un membre d’une ONG, qui ont accepté de jouer le jeu pour mobiliser le public. Car tant que la supercherie n’était pas découverte, les norvégiens se sont réellement mobilisés pour arrêter ce mariage ; un hash tag « stop the wedding » s’était même créé.

    Cette campagne intervient après le court film réalisé par Lisa Azuelos  à l’occasion du 8 Mars 2014 :« 14 millions de cris ».

     Julie Gayet y joue un rôle peu gratifiant : celui de la mère d’une petite française de douze ans Emma, qui rentre de l’école pour être mariée contre son gré à un sexagénaire, avec la complicité de tous les invités. Le film s’achève dans l’horreur d’un viol qu’on devine.

    Selon le Fonds des Nations Unies pour la population, ce sont en effet 14, 2 millions de jeunes filles par an qui sont mariées de force avant leurs 18 ans dans le monde.

     

    Fallait il montrer des fillettes occidentales pour être sûrs de sensibiliser le public européen à la réalité que recouvrent les mariages forcés en Afrique du Nord, de l’Ouest, au Moyen Orient … ? Oui, disent les militants ; tant que cela se passe ailleurs, on se réfugie derrière la « culture », la « différence », pour ne pas voir que des fillettes ne sont pas des femmes.

    Elles peuvent être biologiquement pubères, mais n’ont ni la capacité physique, ni la capacité psychique de supporter des relations sexuelles, dont elles ignorent tout et qu’elles ne désirent pas, et des grossesses, qui meurtrissent leurs corps ou peuvent les conduire à la mort.

    Au Yémen, une fillette de douze ans enceinte est morte après trois jours de travail et de douleurs, faute de prise en charge par des personnes compétentes.

    Non, un tel subterfuge n’était pas nécessaire, répondent d’autres personnes : notre capacité d’identification est elle si faible ?

    Les mariages forcés existent aussi en Europe. Ils concernent des filles majeures ou mineures, et ont lieu sur le territoire des pays européens, ou dans le pays d’origine.

    La fondation suisse « SURGIR » a recensé en 2006 1700 mariages forcés sur le territoire helvétique. (Source : journal »Le Temps » du 17/ 12/ 06) Certaines jeunes filles avaient la nationalité suisse, et appartenaient à la deuxième génération de migrants.*

     1/3 avaient entre 13 et 18 ans, 2/3 entre 18 et 30 ans. Seules 6 d’entre elles ont accepté de témoigner. Les services judiciaires et sociaux semblent s’être trouvés démunis devant ce phénomène, dont ils n’avaient mesuré ni l’ampleur, ni les rouages. Ils ont tenté d’établir la frontière difficile entre mariage arrangé et forcé.

     La conclusion qui s’est imposée est qu’un mariage forcé est un mariage auquel il est impossible d’échapper.

    Certains hommes subissent aussi des mariages arrangés sous pression, mais les conséquences sur leur santé, leur corps et leur psychisme sont moins dramatiques. Même lorsqu’un mariage forcé n’a finalement pas lieu, le stress émotionnel encouru par la victime est immense, car elle a eu peur pour son intégrité physique.

    Nous avons visionné et lu beaucoup d’enquêtes sur les mariages forcés, après avoir reçu dans un cadre professionnel nombre de femmes et de jeunes filles concernées.

    Ces mariages ne peuvent se produire que dans un contexte de total manque d’autonomie des filles ainsi fiancées. Quel que soit leur milieu de vie, elles sont conditionnées à ne pas prendre de décisions pour elles mêmes, à ne pas élaborer de projet de vie personnel, à obéir.

    Celles qui ont la force de se rebeller sont menacées de mort par leur père, leur frère, leur oncle. Ce sont les hommes de la famille qui semblent avoir intérêt à ces mariages. Ils sont souvent conclus pour honorer une dette, financière ou morale.

    En Europe, les hommes n’ont aucune hésitation à essayer de venir retrouver et harceler les filles dans les structures d’accueil où les dirigent les services sociaux.

    Les fiancées contraintes peuvent être originaires d’ex-Yougoslavie, de Roumanie, de Lituanie, de Turquie.

    Les parents peuvent « jouer le jeu » de la scolarité obligatoire, ou de l’âge légal du mariage à la majorité comme en France, mais c’est uniquement un minimum, honoré par peur de représailles des pouvoirs publics.

    Alors, est ce vraiment si éloigné ?

     

    Contrairement à ce que croit l’opinion publique, la religion n’a pas grand chose à voir avec les mariages forcés.* Il s’agit de TRADITIONS, extrêmement anciennes, parfois ante-islamiques ou chrétiennes, mais qui perdurent car elles maintiennent la domination masculine.

    Même quand ils sont interdits par la loi, ces mariages persistent.

    En Ethiopie, des chrétiens marient leurs filles dés quatorze ans.

    Au Kyrgyztan, ancienne république soviétique, la pratique des enlèvements et kidnappings pour épouser une fille, vient de la tribu des Manas.

     Elle a fait un retour en fanfare après la chute du communisme. Le Kyrgyztan est musulman, et les imams disent eux mêmes que ces mœurs violent l’Islam, et violent la loi. (ce serait pour enrayer ce genre de pratique que le Prophète aurait réglementé le mariage) Beaucoup de jeunes femmes ainsi mariées se suicident. Mais on ne parvient pas à éradiquer cette coutume.

    La situation est plus complexe qu’il n’y paraît : il s’agit souvent d’une mise en scène, où chacun tremble de ne pas assumer son rôle : la jeune fille sait très bien qui va venir l’enlever, et quel jour ; la fête est déjà préparée chez les parents du garçon. Mais il y va de son honneur, de sa réputation de « pureté » de se débattre et de crier, de refuser plusieurs fois de mettre le foulard de mariée que lui passe sa belle-mère, pour finir par céder. De même , le garçon a peur que les camarades qui procèdent à l’enlèvement pour lui ne soient trop violents.

    Personne n’est heureux, mais on se cramponne à cette tradition.

    Enfin, en Inde, les mariages d’enfants sont illégaux, mais ils continuent. La police peut intervenir, mais si elle le fait, les familles ont stigmatisées pour plusieurs générations.

     C’est également ce qu’expliquent des policiers afghans ; est ce la solution, demandent ils ? (reportage du « National Geographic » par Stéphanie Sinclair et Cynthia Gowney)

     

    Changer les mentalités est très long, cependant des millions de fillettes et de jeunes filles sont exclues par un mariage précoce de l’éducation et du savoir, de l’autonomie et de la possibilité d’un métier.

    Il s’agit d’un cercle vicieux : en raison de ces mariages précoces, il n’existe pas de professeures femmes qui puissent assurer l’enseignement dans certaines régions, aussi les filles ne vont pas à l’école. Et leur seul avenir est le mariage.

    Des campagnes audio visuelles comme celles que nous avons citées sont nécessaires pour que le monde entier comprenne que les femmes ne sont pas des sous-êtres humains, et qu’elles ont droit à l’enfance.

     

     

    Michelle .C. DROUAULT

     

    2 liens :

    http://theasbryllup.blogg.no

    http://www.lepoint.fr/culture/video-julie-gayet-dans-un-film-bouleversant-pour-la-journee-de-la-femme-07-03-2014-1798566_3.php

     

     

    Notes

     *1 les mariages de mineures étaient coutumiers, et avaient été conclus hors territoire suisse, à l’occasion de vacances. Néanmoins, la victime était obligée de cohabiter avec son « époux », le mariage civil étant prévu à sa majorité.

     

    *2

     

    certains théoriciens d’un Islam fondamentaliste mettent en avant le mariage du Prophète avec Aïcha, qui n’aurait eu que 9 ans…..mais aussi celui du même Prophète avec Khadidja, qui avait 15 ans de plus que lui ; pour dire que le mariage ne doit pas connaitre de limites d’âge.


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  • Les pressions idéologiques en faveur de la gestation pour autrui demeurent fréquentes, et répétées depuis presque une décennie.

    Elles visent à la manipulation d’une opinion publique souvent prête à réagir de façon passionnelle, et impulsivement compassionnelle.

    Les arguments mis en avant sont toujours les mêmes : la détresse des couples stériles, et « l’amour » qui serait le moteur de la décision de devenir mère de substitution.

    Ces propos ne résistent pas à la plus simple analyse.

    Si la détresse des couples stériles est bien réelle, elle ne peut en aucun cas justifier d’infliger volontairement de la souffrance à autrui pour y mettre fin.

    Myriam Szejer* et Jean Pierre Winter, pédopsychiatres et psychanalystes, ont fondé « La cause des bébés », une association pluridisciplinaire qui milite pour « l’éthique du sujet-bébé ».

    Dans une réflexion très rigoureuse parue sous forme d’article dans la revue « Etudes » de Mai 2009, ils détaillent la souffrance et les dommages que la maternité « de substitution » « inflige tant au bébé qu’à celle qui le porte.

    Le fœtus, observe le Dr Szejer, se soucie peu des gamètes, et ce n’est pas elles qu’il reconnaît ! Les parents génétiques sont pour lui des étrangers.

    L’arracher à sa naissance à l’univers de perceptions sensorielles qu’il éprouve depuis le 5ème  mois de grossesse (voix, bruits), bref à l’ambiance familiale de sa vie anténatale, constitue pour lui « un véritable chaos », et une » rupture dévastatrice » avec ce qui permet à un nouveau-né de se repérer dans les premiers moments de sa vie.

    Il faut en mesurer les conséquences.

    Comment, demande-t-elle, les médecins, qui savent tout cela, et ont mis en place tout ce que nous avons cité dans l’article précédent : « peau à peau », « unités kangourous » mère/enfant, pour améliorer le pronostic de survie des prématurés et bébés fragiles, etc… comment certains d’entre eux peuvent-ils apporter leur caution au système des mères porteuses ?

    Prescrire des « abandons sur ordonnance » alors que toutes les recherches sur le psychisme infantile sont unanimes sur le préjudice d’une séparation mère/nouveau-né ?

    Par un processus bien connu, répond le Dr JP Winter : la dénégation.

    La dénégation vient de ceux qui ont intérêt à ce procédé, et retournent en boomerang la violence qu’il implique pour se positionner eux (ou ceux pour qui ils œuvrent) en victimes souffrantes.

    C’est une manipulation mentale bien connue, fort semblable à celle diffusée par les masculinistes concernant les « droits des pères ». La souffrance des enfants y est niée pour mettre en avant celle (réelle ou supposée) des pères, et les droits des enfants se confondent avec ceux des pères ; ce ne sont plus des droits autonomes de sujets.

    Il s’agit d’une régression terrible sur la conception de l’enfance. On a longtemps considéré à tort que les nourrissons ne ressentaient pas de souffrance physique, et qu’on pouvait les opérer sans anesthésie ( !) ; on entend fermer à présent les yeux sur leurs souffrances psychiques et sensorielles, dans le simple but de légitimer une pratique. Il est vrai que le bébé, ici objet de contrat et « produit », n’a pas droit à être sujet pensant….

    Le Dr Winter a été amené à assurer le soutien psychologique d’une mère de substitution.

    En France, le stratagème est simple, et utilisé depuis longtemps, sans que des contrôles suffisants soient effectués pour débusquer ces situations : les parents « génétiques » font pratiquer une FIV à l’étranger, où la mère de substitution se fait inséminer avec l’embryon du couple ; puis elle accouche sous X dans un hôpital français, et le père génétique reconnaît l’enfant.

    Comment, interroge t-il, une femme enceinte d’un enfant peut elle dire que cela ne la fait pas souffrir de l’abandonner à la naissance ?

    En clair, avons nous ici abandonné tout bon sens, et tout sens de l’humain ?

    Comment peut se sentir une femme contrainte de ne pas s’attacher à l’enfant qu’elle porte, quel est ce « déni de grossesse » volontaire ?

    Il est bien étrange qu’une société qui juge à son de trompe les mères en déni involontaire de grossesse par maladie psychique, et s’indigne (à juste titre) du sort des « bébés congelés », soit prête à allègrement prescrire des situations de déni, également sur ordonnance….

    On objectera que jadis, les mères peu certaines de la survie de leur enfant évitaient de trop s’y attacher ; et qu’ils étaient, pendant une longue période (du XVII au XIXème siècle) envoyés en nourrice sitôt après leur baptême.(voir notre article « pères nourriciers ») Certes. Mais revenir à l’équivalent de ces pratiques supposerait, en toute contradiction avec les affirmations précédentes, faire fi des progrès des sciences humaines !

     

    La mère de substitution suivie par le Dr Winter correspondait à tous les critères définis par les partisans de la pratique de la GPA : mariée, déjà mère de plusieurs enfants.

    Elle n’a pas été rémunérée, mais indemnisée.

    Cependant, le praticien souligne qu’il s’agit d’une femme fragile, au passé douloureux, qui s’est laissée attendrir par un couple stérile rencontré sur internet.

    Il évoque le risque que les candidates soient effectivement des femmes qui rejouent inconsciemment par là des maltraitances ou des ruptures infantiles.**

    Les complications sont survenues dés le 6ème  mois, et peu à peu, la mère porteuse a vu ce couple de parents d’intention « souffrant », changer de visage, et ne manifester aucune compassion pour ses difficultés (alitement, souci de garde d’enfants), pour devenir, après la naissance par césarienne, carrément arrogant et envahissant. ( Ce type de comportement a été relaté plusieurs fois aux USA par des mères de substitution qui avaient fini par changer d’avis devant l’emprise tyrannique des parents génétiques sur leur vie familiale)

    La mère porteuse et son mari se sont retrouvés dans une grande souffrance, traitée avec indifférence et désinvolture ; la mère s’était malgré elle attachée au bébé. Mais lorsqu’elle a voulu en demander des nouvelles, les parents « génétiques » sont devenus menaçants.

    Le psychanalyste nous laisse comprendre que la famille de la mère gestatrice mettra du temps à se remettre, ( si cette blessure se referme jamais !) malgré un soutien thérapeutique.

    « J’ai été prise pour un sac », a dit cette femme.

    Voilà à quelle réalité se heurte « l’amour », par lequel on appâte des femmes fragiles, soit par leur situation matérielle, soit par leur situation psychique. Il existe toujours une vulnérabilité.

    N’hésitons pas à dire qu’il s’agit d’un rapport de classe. La pratique des nourrices mercenaires à domicile au XIXème  siècle a été dénoncée comme telle : les bourgeois fermaient les yeux sur le fait que la nourrice devait délaisser son propre enfant pour venir s’occuper en ville d’un enfant de classe aisée que sa mère ne voulait pas allaiter (certains époux l’interdisaient à leur femme).

    Pour les dominants et les commanditaires, peu importent donc les souffrances infligées, du moment que le produit leur est livré. En cela nous pouvons partiellement donner raison à Pierre Bergé (voir 2nde partie) sur un point : les patrons d’usine des siècles précédents ne raisonnaient pas autrement(et ils continuent en Asie et ailleurs).

     

    A la lumière de ces problématiques, il paraît nécessaire de poser la question : qu’est-ce que le désir d’enfant ? Qu’est-ce que le désir d’élever des enfants ?

    Il convient de distinguer le désir de se reproduire, que l’espèce humaine a appris à canaliser pour progressivement maîtriser sa fécondité de manière acceptable, du désir d’avoir des descendants ; et de celui de vivre avec des enfants, et de les aider à grandir.

    Le désir de se reproduire est distinct de l’acte sexuel, et de l’orientation sexuelle.

    Parfois, certaines femmes ressentent une envie très puissante, et très récurrente d’être enceinte, tout le temps de leur jeunesse. Cela ne veut pas dire qu’elles mettent ce désir à exécution, ni qu’elles se retrouvent enceintes tous les ans ! Elles ont assez de raison pour avoir les enfants qu’elles peuvent assumer.

    Le désir de se reproduire implique aussi quelque chose de plus noble, partagé par une majorité d’êtres humains , hommes et femmes : la volonté et le souhait de transmettre un savoir, une terre, un espoir, une foi, des valeurs ; bref la volonté de survivre à sa propre mort par le biais de ses descendants.

    Ce moteur universel est cependant différent selon les époques et les cultures.***

    Il faut y joindre le désir de prolonger l’amour conjugal : donner vie à son amour. Une notion très contemporaine.

    Enfin, il y a le désir de vivre en compagnie d’enfants, et de participer à leur développement.

    Il y a peu de temps que ces trois désirs bien distincts sont censés être condensés dans un terme fourre-tout, le « désir d’enfant ».

    Jusqu’au XVIIIème siècle, la reproduction « animale » était involontaire, et souvent un fardeau pesant et menaçant pour les femmes. Et la volonté de transmettre un domaine ou une charge était plus exacerbée chez les possédants. Quant au désir de la compagnie des enfants, son couplage avec le fait d’être parents est extrêmement moderne : aristocrates et bourgeois ; artisans aisés, n’élevaient pratiquement pas leurs enfants, qui allaient de nourrice en pension, d’apprentissage éloigné en corps d’armée (voir l’article : « Enfances et Famille, des représentations relatives »). Par contre, l’autorité parentale, souvent tyrannique et arbitraire, demeurait indiscutée. De nos jours encore, les nombreuses « nounous »  qui élèvent les enfants des parents de profession libérale ou aisés, montrent la dissociation qui existe entre être parent, et vouloir se charger d’un enfant ou de plusieurs 24h/24. Le désir affiché de la compagnie et de l’éducation des enfants semble plutôt être l’apanage des enseignant-es et éducateur-trices. Qui ne souhaitent pas toujours avoir des enfants à eux….

    Mais plus on descend dans l’échelle sociale, plus l’obligation d’être parent, et surtout d’être mère- de surcroit, une « bonne » mère- se fait absolue.

    Depuis le milieu du XXème siècle, cette obligation a pour les femmes le poids d’une charge écrasante qu’elles assument quasiment seules : la famille élargie a peu à peu disparu, et la participation des pères reste facultative.

    Il semble qu’être mère soit devenu la seule identité constitutive d’une femme.

    Naturellement, plus l’investissement professionnel d’une femme est faible, moins son poste est gratifiant, plus cela est prégnant.

    Néanmoins, le modèle idéologique moderne de la femme « épanouie » « réalisée », est celui d’une femme qui est parvenue à « tout concilier » : carrière, enfants, couple uni….

    Constater que les femmes ne concilient rien, si ce n’est au prix d’une intense fatigue et d’une discrimination stagnante dans le monde du travail, serait l’objet d’un autre débat.

    Pour le moment, interrogeons nous sur l’axiome répété par les partisans de la GPA, à savoir que les mères porteuses vont permettre à d’autres femmes d’enfin « donner un sens à leur vie ».

    C’est un retour à une idéologie issue du XIXème siècle patriarcal et occidental, afin de faire rentrer les femmes à la maison, et de les écarter des études et du marché du travail (du moins celles qui ne pouvaient être exploitées dans l’industrie et les services !) : une femme n’en est une qu’à la condition d’être mère, état qui doit remplir toute sa vie.

    Le « progrès » tant vanté auquel nous ne pouvons pas nous soustraire, est au contraire un rétropédalage idéologique inquiétant.

    On comprend alors l’acharnement des femmes dont le couple est stérile à procréer à n’importe quel prix, si hors de cela, leur vie est réputée sans valeur. A leurs yeux, à ceux de leur conjoint, et de la société.

    Etre mère est une part de la vie d’une femme, cela ne la définit pas.

    Mais pourquoi l’adoption est elle si peu plébiscitée ?

    Jean Pierre Rosenczveig, magistrat, président du Tribunal pour Enfants de Bobigny, donne sur son blog une hypothèse d’explication :

    Quinze mille demandes d’adoption ont été enregistrées dans l’année par les Conseils Généraux.

    Or 2300 enfants seulement sont adoptables, c’est à dire pupilles de l’Etat.

    On ne peut que s’en réjouir : ils étaient 20 000 en 1980.

    Cependant, dit-il, la majorité des candidats à l’adoption veut un bébé de 3 mois environ, de type européen, en bonne santé.

    Et les enfants adoptables sont âgés de 7 à 9 ans, souvent de couleur, souvent handicapés, et beaucoup sont en fratrie.

    Certains, ajoutons-le, ne sont adoptables qu’en « adoption simple », c’est à dire qu’ils gardent leur nom, et un lien avec leurs parents de naissance.

    Devant ce décalage, il évoque le « déphasage » des candidats, qui se tournent alors vers l’adoption internationale, ou….la GPA, alors qu’ils savent se trouver en pleine illégalité !

    A ce propos, le magistrat exprime son exaspération*° devant le tapage médiatique de la poignée de personnes aspirant à « avoir » un enfant coûte que coûte, alors que la loi sur la famille devrait avant tout viser à résoudre les difficultés communes de millions d’enfants (le statut du beau-parent, entre autres).

    Adopter un enfant qui a une histoire de plusieurs années n’est pas simple. Cet enfant a eu en général un parcours difficile : deuil, maltraitance, violence, incarcération ou maladie incurable des parents, placements multiples, scolarisation décousue ou peu valorisée…Il peut avoir été confié pour adoption en raison d’un handicap, et en garder la blessure inconsciente.

    Elever un tel enfant, avec parfois ses frère et sœurs, demande de l’abnégation, de la solidité, et du soutien, familial et psychologique, voire spirituel.

    Ne sommes-nous pas en train d’assister à l’obsession de l’enfant parfait, de l’enfant rêvé ?

    Mais surtout, à la victoire d’un narcissisme exacerbé : l’enfant parfait ne peut venir que des gênes, des gamètes, transmises ou choisies par les parents ; et il doit socialement « donner l’illusion » d’un enfant conçu naturellement. C’est le triomphe d’un étrange biologisme ; de la notion archaïque de « la voix du sang », autre régression impliquée par la préférence de ces pratiques contestables à l’adoption.

    Nous pouvons poser la question : pourquoi toutes ces personnes « en mal d’enfant » ne s ‘occupent-elles pas pour commencer des enfants qui ont des parents en difficulté ?

    Ils et elles pourraient parrainer des enfants, devenir parents de villages d’enfants orphelins, bref donner de l’amour et de l’attention au grand nombre d’enfants sous le seuil de pauvreté (deux millions en France !) qui ont besoin de soutien sous diverses formes.

    Et si tout cet argent investi dans des GPA à l’étranger était utilisé à donner un toit décent à des enfants mal logés ? On peut toujours rêver….

    On pourrait imaginer aussi qu’il existe une « formation de parents adoptants », pour adapter les parents à la réalité des enfants adoptables, et les accompagner dans le deuil du poupon imaginaire qu’il leur faudra faire….

    S’il n’existe pas de « droit à l’enfant », il existe une « Convention des Droits de l’Enfant ».

    Offrir de l’équilibre, du bonheur et de l’éducation au maximum d’enfants qui peuplent déjà la planète devrait être une priorité, avant d’en fabriquer d’autres dans des laboratoires.

    Ceci bien sûr ne remet pas en question les FIV intra-conjugales de couples qui ont des difficultés à concevoir, je m’empresse de le préciser.

    Nous avons peu de recul : les enfants nés par GPA sont encore petits.

    Quels adolescents, quels adultes deviendront ils ? Les traumatismes de leur période néo-natale auront ils une répercussion sur leur devenir ? Comment assumeront-ils leur histoire ?

    Nous l’ignorons.

     

    Michelle C. DROUAULT

    (Avec mes remerciements renouvelés à B. de Dinechin)

     

    Notes :

     

    *Myriam Szejer est l’auteure, entre autres, de « Ces Neuf mois là », préfacés par le Pr René Fryman ; et de « le bébé et les ruptures ».

     

    ** C’est un fait que nous avons déjà constaté en tant que travailleur social chargée des entretiens en vue d’un recueil temporaire à l’Aide à L’Enfance, ou d’un consentement à l’adoption

     

    *** et il est encore teinté de nombreuses discriminations de genre, certaines fonctions ou héritages ne pouvant être laissés à une femme. A l’opposé certains savoir-faire artistiques ou médicinaux ne se transmettent que de grand mère à petite-fille, ou de mère en fille.

     

    *° « Parlez moi de moi, Y’a que moi qui m’intéresse » sur le blog de JP Rosenczveig.

     

     

     

     

     

     

     

     


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  • Dans un de ses colloques , le professeur Jacques Testart, directeur honoraire de recherche à l’Inserm et scientifique, aborde la fuite en avant de ce qu’il appelle la « technoscience », et le manque de précaution et de réflexion qui prévaut , aussi bien dans ce qui touche à l’environnement qu’en matière de bioéthique.

    Il évoque (je cite) « l’escalade récente des propositions pour engendrer les enfants », et la confrontation de la bioéthique à la notion de « progrès » sans limites.

    Citant lui aussi la philosophe Sylviane Agacinski, et sa préconisation de la bioéthique comme une « autolimitation de la puissance », le scientifique reste néanmoins pessimiste.

    Il estime que la séduction du langage dont nous parlions précédemment finira sans doute par « éroder la violence initiale » (je cite) de techniques absolument surréalistes comme le clonage d’organes humains ; ou encore d’êtres humains. Dans cette fuite en avant, certains souhaitent des recherches dans ce sens, et le pire serait encore à venir…

     

    Lorsqu’on voit qu’une célèbre psychanalyste, qui a par ailleurs remarquablement analysé et démonté les motivations passionnelles et  anti-intellectuelles  de beaucoup de sympathisants des « Manif pour Tous », est favorable à la GPA au motif qu’ « il est illusoire de s’opposer au progrès de la science » ; et qu’un autre philosophe très médiatisé dont elle est pourtant une des plus farouches contradictrices**, clame que rien de ce qui est techniquement possible ne pose problème, et pourquoi pas un utérus artificiel ? … les bras vous en tombent, et nous avons de bonnes raisons d’être inquiet-es.

     

    Le professeur Testart pose une question essentielle : la médecine est elle bien dans son rôle quand elle participe à des montages comme l’AMP (assistance médicale à la procréation) ou éventuellement la  « gestation pour autrui » ? Y-a t- il maladie ? La stérilité est elle une maladie ou une incapacité ?

    Nous avons visionné un reportage sur l’IAD (insémination artificielle avec donneur) et les dons d’ovocytes en France. Une impression de malaise s’est dégagée pour nous à regarder ces entretiens où le médecin demande avec précision au « père social » la couleur de ses yeux, de ses cheveux, son groupe sanguin, son poids, sa taille, ses goûts…afin de choisir un donneur qui corresponde au plus près à ce tableau, et créer ainsi une parfaite supercherie organisée, puisque jusqu’à une date récente, on recommandait le secret aux parents d’enfants nés par IAD.

    Il arrive aussi que ce soit la mère qui ait un problème de stérilité, et doive faire appel à une donneuse ; l’ovocyte de la donneuse est alors fécondé avec le sperme du père ; mais ces cas sont plus rares.

    Et il nous est apparu  ce qui a également frappé le scientifique : C’EST AU MÉDECIN QU’APPARTIENT LE CHOIX DU DONNEUR OU DE LA DONNEUSE.

    Est il ou elle à sa place ? Quel pouvoir exorbitant est le sien de décider de la généalogie biologique d’êtres humains ! Et le praticien n’est il pas naturellement tenté de pratiquer une certaine forme d’eugénisme involontaire, c’est à dire d’attribuer ce qu’il y de « meilleur » à ces futurs parents ?

    Dans une récente interview télévisée, J. Testart a rappelé que si dans notre pays 2, 5% d’enfants naissaient par IAD, dans 25% des cas, la stérilité des parents n’était pas démontrée.

    Dans ces cas là, le médecin serait alors une sorte de démiurge qui prend en charge l’impatience ou les difficultés psychiques d’un couple (alors qu’il n’est pas psychiatre) pour les traiter par la satisfaction du désir. Est ce bien le fait du serment d’Hippocrate ?

    En ce qui concerne la GPA, le rôle du médecin est encore plus discutable : il met en relation, en vue d’un montage social, une femme dans le besoin et un couple hétérosexuel ou homosexuel. 70% des demandeurs de GPA aux Etats Unis sont des couples d’hommes.

    Ces hommes ne sont pas stériles. Mais il leur faut souvent « utiliser » deux femmes pour satisfaire leur fantasme et leur désir, une donneuse, et une mère porteuse.

    Dans son intervention, Testart accuse toutes ces pratiques d’ « installer durablement l’assistance médicale dans l‘univers marchand, pour la satisfaction d’intérêts particuliers ». (citation)

    Et en effet.

    Nous avons consulté les sites d’un organisme américain de « mères de substitution » qui fait là bas une grande publicité, et tente de s’implanter en Europe.

    Nous avons étudié les clauses de contrat, et la linguistique.

    Le langage est effectivement un langage commercial, émaillé de termes médicaux.

    Il y a le contrat lui même, les garanties, les tarifs.

    Les notes additionnelles sont assez symptomatiques des glissements sémantiques opérés pour une meilleure accroche : la mère de substitution n’est JAMAIS appelée « mère », mais seulement « surrogate », c’est à dire « substitut » en substantif. L’anglais étant neutre, cela peut être traduit littéralement par « le substitut », ou « votre substitut ». Il y a donc pour les parents une dépersonnalisation progressive de la mère porteuse au profit de la visibilité  unique des « parents d’intention ».

    Ceci s’adresse à eux.

    Le langage médical est assez cru et direct, mais il évite soigneusement toute personnalisation ou mention des êtres humains qui participent à l’opération :

    Je cite :

    « Pour un total de 33 750 $, et une garantie additionnelle de 5000 $* pour les frais d’agence, vous recevrez (qui est « vous » ? En fait, c’est la gestatrice qui reçoit , mais elle est gommée)

    soit 3 transferts de 2 embryons, soit frais, soit congelés ; ou des ovocytes fécondés ou congelés ; OU ENCORE 6 transferts d’1 embryon frais ou congelé, ou d’1 ovocyte fécondé et/ou congelé. Le premier transfert est toujours effectué avec des ovocytes frais provenant d’une donneuse contrôlée par un médecin. Si les parents d’intention n’ont pas de succès au premier essai, et qu’il reste des embryons congelés, ils peuvent utiliser les embryons qui leur sont médicalement recommandés. S’ils ne sont pas recommandés (on les a triés), ils peuvent essayer un nouveau cycle avec dix ovocytes, ou embryons congelés provenant d’une donneuse contrôlée ».

    Les termes « femme », mère », n’existent pas, il n’existe que des manipulations.

    Seuls les parents sont sujets, les donneuses et les porteuses sont objets, non nommées,

    in-nommables. Quant au terme « transfert », d’une terrible froideur technique, il nous a rappelé d’autres enrobages linguistiques de sinistre mémoire.* 1

    Les intermédiaires, qui ont pour FONCTION de produire ou de couver, sont totalement effacées, comme si l’intention était le seul moteur de l’action : ce sont les parents  qui reçoivent, font des tentatives et des essais, utilisent….On supprime ici la réalité humaine du don d’ovocyte et de l’insémination. Nous sommes dans le fantasmatique et l’illusion volontaire.

    Les donneuses d’ovocyte reçoivent souvent des traitements hormonaux pour produire plus d’ovocytes. Ces traitements ne sont pas anodins. Ils peuvent altérer les fonctions rénales, par exemple, qu’il faut surveiller attentivement, ou les fonctions hépatiques. Un don d’ovocyte est douloureux.  Une anesthésie locale peut être nécessaire. Il n’en est nulle part fait mention.

    Quant à l’insémination de la gestatrice, une fois que l’ovocyte de la donneuse a été fécondé avec le sperme du père, elle nécessite un examen gynécologique, et l’assurance que l’intéressée n’ait pas eu de rapports sexuels pendant au moins 72 H  avant l’opération.

    Ce n’est pas anodin non plus.

    Examinons ensuite les « frais payés à l’agence ». Le total estimé est de 88 610$*2

    Ils comprennent des examens médicaux (VIH), psychologiques, de la donneuse et de la gestatrice, et une recherche de casier judiciaire.

    Un don d’ovocyte est rémunéré 8000$,  frais d’agence 6500$

    Chaque « transfert » supplémentaire coute 500$,

    La gestatrice est rémunérée 22 500$ + 1200 de compensation de salaires+ 500 d’allocation de vêture+ 200$ par mois pour frais divers.

    Il existe environ 5000$ de frais d’avocats, 3500$ d’honoraires d’un travailleur social.

    L’agence empoche 41 410$.

    S’il ne s’agit pas d’une traite des femmes, what else ?

    Le fait qu’une assistante sociale soit prévue m’a interpellée. Que vient-t-elle faire là ? Quel est son rôle ? S’assurer que la mère porteuse ne s’attache pas à son bébé ? Ne refuse pas de le « remettre » ?

    Nous assistons à la dérive d’un dévoiement général de missions de service public (médecine, service social, assistance judiciaire) en direction d’intérêts particuliers.

    Quand tant de personnes renoncent à des soins, ont besoin d’une aide sociale personnalisée ou d’un avocat commis d’office, nous voici dans un libéralisme sauvage  qui estime que tout s’achète, et que tout doit être au service du marché.

     

    Mais l’embouteillage des tribunaux avec des affaires de mères porteuses a déjà commencé en Europe :

    La Cour de justice Européenne vient de refuser le congé de maternité à deux « mères commanditaires » (encore un terme intéressant) qui l’avaient demandé.

    En effet, et cela nous rassure, la Cour a estimé que c’est la femme qui porte le bébé et en accouche qui a droit au congé de maternité pour compenser la fatigue de cet état de fait.

    Par contre, les « mères commanditaires » peuvent demander à leur pays de résidence un congé d’adoption. Il est important de noter que la deuxième mère a fait état de sa malformation utérine comme d’un handicap et a évoqué une discrimination à son égard fondée sur le handicap, ce qui également été jugé non fondé.

    L’impossibilité de porter un enfant est certes une souffrance morale, ce n’est pas un handicap qui peut nuire à la carrière ou à la vie d’une personne.

     

    Dans une troisième partie, nous évoquerons le désir d’enfant/désir d’élever un enfant ; et les solutions alternatives raisonnables à l’impossibilité d’avoir un enfant par soi même.

     

    Michelle. C. DROUAULT

    ** p.1 :il s’agit de la controverse entre E. Roudinesco et Michel Onfray sur, entre autres, son ouvrage sur Freud

    ** p.2 : soit 24 258 euros et 3594 eur de garantie additionnelle

    * note 1  « réinstallation » pour déportation, entre autres…

    * note 2 =63 680 euros

    Liens : colloque de J. Testart : http://jacques.testart.free.fr/pdf/texte926.pdf 

     

     


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  •  La philosophe Sylviane Agacinski vient de publier une réédition de son ouvrage « Le Corps en Miettes » revue et augmentée.

    Rappelons le, ce petit livre dénonce les dangers de la Gestation pour Autrui-en clair le système des mères porteuses-, et donne à voir sa réalité : un contrat qui permet la mise à disposition d’un corps et d’une vie pendant un temps X, et la vision d’un enfant comme un produit ; alors qu’en droit français le corps humain est résolument indisponible.

    Dans une interview radiophonique récente, la philosophe va plus loin :

    « La GPA, dit elle, est une démission de la pensée ».

    La formule nous a intéressées, et nous avons essayé de la questionner.

    Est ce vraiment une démission ?

    Nous avons plutôt vu à l’œuvre un certain nombre d’artifices, de détournements, de dénis, de dérives langagières, liés entre eux de manière complexe, pour amener la pensée à accepter l’inacceptable.

     

    DÉTOURNEMENTS ET DÉNIS

    Les partisans français de la « gestation pour autrui » s’autoproclament en général de gauche, ce qui les pousse à éliminer en vitesse tout l’aspect d’exploitation « de l’homme par l’homme » qui ne peut manquer de surgir ; et à justifier les pratiques revendiquées par des axiomes qui appartiennent à l’idéologie de la gauche humaniste, qu’ils défigurent.

     

    La philosophe établit un parallèle avec la prostitution (après tout, il s’agit de corps à vendre).

    Or, nous venons d’assister, concernant la prostitution, au détournement le plus grotesque et le plus obscène d’une des premières revendications des mouvements de libération des femmes, « notre corps nous appartient », par des hommes. La rhétorique est simpliste : si le corps des femmes est à elles, elles sont alors libres de le vendre, au prix qu’elles souhaitent, pour une heure ou neuf mois ! Montrant rapidement le bout de l’oreille en clamant que « nul ne peut limiter nos désirs et nos plaisirs » (les leurs) ils réaffirment la toute-puissance des mâles sur le corps des femmes, vénales ou non.

     

    Les figures de proue des associations en faveur de la GPA sont majoritairement des hommes, même si certaines femmes sont à leurs côtés ; et les déclarations fracassantes et méprisantes de Pierre Bergé (fondateur du Sidaction) : « Louer son ventre pour faire un enfant, ou louer ses bras pour travailler à l’usine, quelle différence ? », comparaison DÉJÀ utilisées par les défenseurs du droit d’utiliser une prostituée, ne démontrent que l’ignorance et le dédain de son auteur pour ce qui se passe dans le corps des femmes.

     

    Que l’on parle à la place des femmes pour leur imposer des maternités non souhaitées ( dans le cas de l’Eglise) ; ou pour justifier la mise à disposition de leur sexe et de leur corps ( pour ces beaux parleurs arrogants), la place des femmes est la même : sans voix, chosifiées, distributeurs à plaisirs, ou couveuses vivantes… Maintenant qu’on ne peut plus les faire taire avec la menace de l’Enfer, on bâillonne les femmes avec l’argument de la libération qu’elles ont elles-mêmes réclamée, en le déformant, toujours pour le profit des hommes. Leur domination  a simplement changé de visage.

     

    Est convoquée également sur un ton péremptoire la notion de « progrès ».

    L’archaïsme et la brutalité de ce qui se joue doit être camouflé sous l’étendard du sacro-saint progrès, dont on nous abreuve, avec l’affirmation stupide et mensongère que, comme le souligne Sylviane Agacinski « Tout ce qui est techniquement possible est un progrès ».

    Ne pas questionner une telle affirmation est un déni de recherche sur l’Humain.

    Le « techniquement possible » ou « techniquement meilleur », peut être au service de projets humanistes OU destructeurs. Et une même invention peut être un bien ou un mal suivant qui l’utilise. Sans vouloir nous livrer à la surenchère argumentative qui fait apparaître à coup sûr le nazisme, il est évident que la recherche du « techniquement possible » et du « techniquement meilleur » a fait partie du champ de recherche du nazisme pour ses éliminations de masse, par exemple. Une telle affirmation est donc irrecevable.

    Néanmoins, il ne se passe pas de semaine sans qu’un politique ou une personnalité médiatique, voire un scientifique, ne s’exclame « mais enfin, la France est en retard, terriblement en retard ! » sur la PMA, la GPA, ou la fin de vie, et ne cherche à nous en faire honte.

    Récemment, on a osé présenter comme un progrès le fait qu’en Belgique, un enfant malade puisse décider de sa propre mort, lui déniant ainsi le statut d’enfant, avec l’irresponsabilité nécessaire qui l’accompagne.

    En retard sur quoi, sur qui, pourquoi, comment ?

    Naturellement, la question n’est pas posée.

    Mais le déni du réel se cache sous une dérive langagière qui habille, travestit, banalise, déconstruit ; bref habitue en douceur l’esprit à la barbarie….

     

    NOVLANGUE OU TERMINOLOGIE DE L’ABSURDE ?

     

    L’écart entre les mots posés, et la réalité empirique des faits, est une des violences de ce qu’Arendt nommait « la banalité du Mal ».

    Linguistiquement, il s’agit d’un écart volontaire entre le signifiant et le signifié, afin d’éroder le scandale que pourrait provoquer la juste dénomination d’un fait ou d’une pratique.

    Si aux USA, les termes du « contrat » de gestation pour autrui sont directement posés, très crûment, impliquant la « livraison » d’un enfant en bonne santé, en France, on nous berce d’un sirop douceâtre :

    « Altruisme » ; « don d’enfant » « aide à la fertilité » ; parents d’intention » ; « remise de l’enfant » « compensation », indemnité»….. « bonnes pratiques », « GPA éthique » ; « encadrement de la GPA »..

    Que recouvre cette terminologie ?

    La notion d’altruisme est absolument démentie par le fait que nulle part, en aucun pays, il n’existe de femmes riches qui se proposent de porter des enfants pour des femmes pauvres.

    La « gestation » ne va que dans un sens : la mise à disposition de ventres de louage de femmes de pays ou de classes défavorisées pour des couples riches, et en majorité blancs.

    Ces femmes n’ont aucune inclinaison altruiste particulière, mais des besoins, dont celui d’entretenir correctement leurs propres enfants. Les « compensations » ou « indemnisations » n’ont aucune commune mesure avec le niveau de vie des mères porteuses, et représentent des gains inespérés. En Ukraine, un des pays les plus économiquement déficient d’Europe, le salaire moyen est de 170 euros ; le coût d’un enfant par mère porteuse varie entre 9000 et 12000 euros.  Dix fois le salaire annuel.

    Nous pouvons relier cela au trafic d’organes (Turquie, Roumanie, Inde) que l’on peine à enrayer. Quand on n’a plus rien à vendre que son propre corps, il se trouve toujours des professionnels de la traite des êtres humains pour en faire commerce.

    Concrètement, dans les pays où la GPA est autorisée, ce splendide altruisme supposé est implicitement mis en doute : aux USA, le « contrat » prévoit l’obligation absolue pour la mère de remettre l’enfant au couple après la naissance, au besoin par l’intermédiaire de la police (cela s’est vu) ; dans d’autres pays, on endort la mère pendant l’accouchement pour qu’elle ne voie pas l’enfant à la naissance ; enfin, on déclare qu’il vaut mieux que la mère porteuse ne porte pas un enfant issu de ses propres ovocytes, afin qu’elle ne « court pas le risque de s’attacher à l’enfant  qu’elle porte » et « qu’ils ne deviennent pas trop proches ».

    Il faut réaliser la violence de ces propos : l’organisation délibérée du non-attachement de la mère et de l’enfant, comme si la grossesse n’était qu’un travail animal, et pas un travail tout à la fois d’échanges psychiques et physiques.

    Lorsqu’une mère accouche « sous X », on soustrait en général l’enfant à sa vue. Mais si une association agréée accompagne depuis une quinzaine d’années ces mères après la naissance si elles le souhaitent, c’est bien parce que des graves dépressions, comportements suicidaires ou addictifs, ont été observés par les services sociaux. Ce qui est sans surprise.

    Pour le « don d’enfant », il n’existe pas en droit français ; un être humain ne pouvant être « cédé ». La mère étant, selon ce même droit, celle qui accouche de l’enfant, la mère porteuse serait contrainte de consentir à l’adoption de son enfant.

    Or, on ne peut demander une adoption nominale ; l’acte de consentement à l’adoption est déposé devant l’Aide Sociale à l’Enfance, qui se réserve le droit de rechercher les meilleurs parents adoptants. S’en suit, au bout de trois mois, s’il n’y a pas eu rétractation, un jugement de transfert des droits parentaux à l’Etat.

    Observons que la mère porteuse ne bénéficie dans aucun pays d’un semblable délai, et que ses choix sont encore plus contraints que ceux de n’importe quelle mère.

     

    Mais, hors du champ juridique, que recouvre de concret la soustraction de l’enfant à celle qui l’a porté ?

    Qu’implique –t-elle ?

    Nous avons visionné de nombreux reportages sur les bébés prématurés, et grands prématurés, et il nous a été donné d’aller dans des services de néonatologie.

    Un bébé prématuré devrait encore être dans le ventre de sa mère. Il ne peut, avant 8 mois, se nourrir ou respirer seul. Ce qui aide à sauver les grands prématurés, c’est la présence quotidienne, rassurante, de leur mère (et si possible de leur père) dont ils ont entendu la voix, ressenti les émotions pendant qu’ils étaient en sécurité au chaud in utéro. ; puis le lait maternel, d’abord tiré, puis donné au sein dés que le bébé en est capable.

    La présence de la mère est considérée comme si importante, et même vitale, qu’on commence à essayer d’hospitaliser systématiquement la mère et le bébé dans le même établissement, pour qu’il n’existe aucune rupture de contact.

    On a aussi découvert que le « peau à peau », le fait de poser le bébé plusieurs heures par jour sur la poitrine découverte de sa mère, qu’il reconnaît, et aussi de son père, aidait considérablement à la survie de grands prématurés, qui avaient de plus grandes chances de se développer normalement.

    Il nait en France 55000 bébés prématurés par an, pourquoi ceux issus de mères porteuses échapperaient ils miraculeusement à cette éventualité ?

    Que se passera t-il alors en cas de naissance prématurée ? A-t-on l’intention de substituer à la mère « gestatrice » qui a porté l’enfant la mère « d’intention », qui n’a évidemment pas de lait, et dont la voix et les gestes, inconnus, ne sont pas aptes à rassurer le bébé ?

    Voilà donc des enfants à qui on ôterait délibérément des chances de survie ?

    A moins que, dernière « traite des femmes », on ne tire le lait de la gestatrice, donné par la mère d’intention… nous voilà dans la pire science-fiction.

    On peut aussi craindre que, comme dans le cas de naissance d’enfant handicapé, les parents d’intention déclarent ne pas vouloir d’un prématuré, car trop fragile…..

    Dans un débat sur France Culture, la juriste Muriel Fabre-Magnan, auteure du livre « Gestation pour autrui, fiction et réalités » ( Fayard, 2012), évoque en effet  avec inquiétude le cas des enfants qui naîtraient handicapés, car des cas de rejet se sont déjà produits aux USA.

    Sa contradictrice, favorable à une GPA « encadrée », lui répond benoîtement que l’enfant sera alors « remis aux services sociaux ». Très simple !

     Il ne s’agit pas d’un colis postal qu’on « remet ».
    Pour avoir pratiqué ce type d’entretien, des parents qui ne se sentent pas capables d’assumer un enfant trisomique, par exemple, et savent qu’il ne pourra être que difficilement adopté, sont en état de grande souffrance en venant le confier à l’Aide à l’Enfance. Quand à l’enfant, il ressent qu’il va quitter pour toujours son univers, et lui aussi ressent une terrible angoisse, qui se manifeste souvent par des cris ou des pleurs, une léthargie totale ; ou une maladie dés l’admission.

    On a beau parler au bébé, demander aux parents de lui expliquer leurs sentiments et leurs limites, rien n’y fait. Tout le monde est bouleversé. Or, ces situations douloureuses sont le fait des aléas de la vie. Mais les organiser est indéfendable.

    N’étant pas psychanalyste, je ne me lancerai pas dans des supputations sur le fait que l’enfant de mère porteuse demeure pour les parents  « d’intention » sûrement imaginaire, car il n’est pas réel : force est de constater que personne ne songe à la réalité de son destin si, comme il peut arriver à tous les bébés, il nait prématuré, malade, ou handicapé. C’est un bébé virtuel.

    En effet, personne ne parle du fait qu’aucun bébé de mère porteuse, prématuré ou à terme, ne peut être allaité.

    Pour eux, finies les campagnes sur les bienfaits de l’allaitement maternel, qui tout à la fois protège des infections, et tisse des liens qui fortifient.

    Un lent travail de désinformation parallèle est d’ailleurs mené, à coups de petits articles en apparence sans lien avec la GPA :

    une des personnalité médiatiques les plus favorables à une « GPA éthique » est partie en guerre contre l’allaitement maternel (il « aliénerait » les femmes), et soutient à qui veut l’entendre que l’instinct maternel n’existe pas du tout ! Il est certainement très inégalement réparti, et très différent selon les époques et les cultures. Et il existe des femmes pour qui la maternité est impensable. Mais c’est tout un ensemble d’instinct, de mémoire et de conduites apprises et guidées par les autres femmes, qui fait des femmes  les « mères suffisamment bonnes » (Winicott) pour procurer aux enfants la base d’attachement stable qui les construit, en Afrique comme en Finlande !

     

    Quant aux complications qui peuvent surgir pour la mère porteuse, nul ne s’en soucie. Autre réalité déniée, pour qu’un enfant naisse, il faut un accouchement !

    Cet accouchement peut être compliqué d’une présentation par le siège, d’une mauvaise position du cordon ; d’une subite hypertension  de la parturiente, d’une épisiotomie, voire d’une césarienne… et souvent de grandes douleurs. Ya-t-il un prix de la douleur ?  De plus, la parturiente ne peut avoir le réconfort de son conjoint auprès d’elle, puisqu’il ne s’agit pas de son enfant.

    Qui va prendre en charge ces complications ? Les mères porteuses ukrainiennes se plaignent que ces aléas ne sont pas indemnisés…certaines souffrent ensuite de troubles mentaux, reconnaissent des soignants.

    On nous rabat les oreilles des dangers du « baby blues », mais, pour les mères de substitution, ce risque est subitement évacué, inexistant…

    La mortalité maternelle est certes très faible en Occident, mais elle existe…Ce risque couru par « altruisme » peut être un risque vital.

     

    Qui courrait de pareils risques pour autre chose qu’une nécessité absolue ?

    Peut on « encadrer » les sentiments humains, le lien, l’attachement, la douleur ?

    Où est donc la fameuse « éthique » de la GPA ?

     

    Elle est effectivement impossible, renchérit Muriel Fabre-Magnan, car cette pratique porte atteinte aux libertés fondamentales de la mère porteuse : son intégrité physique, psychique, sa liberté de vivre comme elle l’entend (certains contrats américains réglementent même la sexualité de la gestatrice !) On ne peut « encadrer »la mise à disposition du corps et d’une portion de vie d’autrui, sous peine de revenir à l’esclavage : une grossesse, c’est 24h/24.

    Elle réduit un enfant « remis » à un  produit qui doit être parfait pour convenir, ouvrant la porte à un certain eugénisme.

    La dure réalité camouflée par tous ces jolis mots ronflants serait celle d’Aldous Huxley : une  sous-classe de femmes dans le besoin destinée à une « fabrique de bébés » pour les classes supérieures. Et une déshumanisation totale du maternel.

    A quel prix pour l’espèce humaine ?

     

    Michelle C. DROUAULT

    (avec mes remerciements à B. de Dinechin pour son aide documentaire)

     

    Liens : Interviews et débats avec : Sylviane Agacinski

                                                            Muriel Fabre-Magnan

    http://www.franceinfo.fr/entretiens/un-monde-d-idees/sylviane-agacinski-la-gpa-est-une-demission-de-la-pensee-1331955-2014-02-26

    http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=4618450

     

    Reportage  vidéo sur les mères porteuses aux USA

    http://m.youtube.com/watch?v=ohozmyEgx_g 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Tandis que des milliers de femmes et d'hommes déferlaient dans les rues de Madrid samedi dernier pour clamer le droit fondamental des femmes à mettre fin à une grossesse non désirée dans les délais légaux, les évêques espagnols ont déclaré, eux , que la loi réduisant les possibilités d’IVG aux cas de viol et de danger pour la mère était « une avancée positive ».

    En France, 40 000 personnes ont manifesté leur solidarité avec les femmes espagnoles et plus de 2000 ont manifesté à Bruxelles devant le Parlement Européen.

     

    Poursuivons notre tour d’horizon des positions des religions par rapport à l’interruption de grossesse…

     

    Les PROTESTANTS sont sortis de leur silence en 1971, à l’époque où le débat était déjà bien avancé en France.

    « Dans certains cas, il y a plus de courage et d’amour à prendre la responsabilité d’un avortement qu’à laisser venir au monde des vies menacées » (déclaration de la Fédération Protestante de France). Les cas envisagés étaient limités : viol, inceste, menace pour la santé de la mère ou de l’enfant. Cependant, cette déclaration exprimait aussi que l’avortement était toujours un acte grave, et ne devait en aucune manière remplacer la contraception.
    Les femmes devaient être en mesure de prendre des décisions libres et responsables, accompagnées et soutenues par un service social compétent.

    En 1973, cette position a été élargie aux cas de détresse sociale, tout en précisant que ce n’était pas une raison pour ne pas combattre la misère et les problèmes sociaux.

    Puis le débat s’est poursuivi, avec un appui à la loi Veil, « en raison des convictions chrétiennes » des protestants : ceux ci se montraient particulièrement sensibles aux centaines de décès annuels provoqués par les avortements clandestins.

    En 1994, un document commun aux différentes Eglises protestantes, dans un but louable de débat et de compromis, pose un certain nombre de principes :

     

    -l’avortement est toujours un acte grave, et il doit être combattu,

    -il doit l’être par la PRÉVENTION : éducation à la responsabilité en matière sexuelle, contraception, aides sociales familiales.

     

    -L’IVG doit être dissociée de la contraception : la sexualité n’est pas seulement destinée à la procréation ; elle est un plaisir partagé et gratuit ; la contraception fait partie de la responsabilité des couples. Par ailleurs, la maîtrise de la démographie est quelque chose de nécessaire au point de vue planétaire.

    -L’embryon peut être considéré comme « une personne humaine POTENTIELLE », mais le choix final doit absolument revenir à la femme qui le porte, parce que c’est elle qui éprouve la douleur de la situation ; « Il y a un point où le jugement s’arrête, et laisse place à la simple compassion ».

    Enfin, les protestants soulèvent le point des failles juridiques et humaines de la loi Veil sur l’avortement thérapeutique. Ils suivent avec intérêt les progrès médicaux sur la contraception et la fertilité.(contragestifs, diagnostics prénataux, fécondations in vitro..)

     

    LES ORTHODOXES

     

    Pour les orthodoxes, la fécondité et la reproduction ne sont pas la justification du mariage.

    Le mariage est une « bénédiction de la vie » ; l’amour est une fécondation réciproque.

    La contraception consiste à transcender la nature. Elle est l’affaire des couples, car, dit un patriarche « Si une femme et un homme s’aiment vraiment, je n’ai pas à entrer dans leur chambre ; tout ce qu’ils font est saint »

    Toute forme adaptée de contraception doit être mise en œuvre pour éviter l’IVG.

    Celle ci est un moindre mal dans des cas graves : menace pour la santé de la mère, viol, inceste, malformations incurables du fœtus, détresse psychologique et sociale rendant la maternité impossible.

    Cependant, même en dehors de ces cas, un langage de compréhension et de miséricorde doit être tenu.

    La femme n’a pas à être tenue pour plus responsable de cet acte que l’homme ou la société.

    Afin d’éviter l’IVG, la communauté est tenue de soutenir une mère célibataire, et de ne pas la blâmer.

    Enfin, pour toute interruption de la grossesse, qu’elle soit naturelle et spontanée, ou volontaire, une prière est dite.

    Certains orthodoxes russes ont actuellement des interprétations beaucoup plus restrictives et jugeantes, mais il semble qu’elles soient surtout liées à la volonté d’être en phase avec des mouvances de la société civile très patriarcales et misogynes.

    Dans la religion orthodoxe, le même regard de miséricorde est posé sur le divorce et le remariage. Un évêque peut considérer qu’un mariage a cessé d’exister en cas de séparation de fait durable, de violence, d’aliénation mentale, d’adultère répété.

    Un second mariage peut être béni, mais il doit être accompagné d’une démarche pénitentielle. Eviter les mêmes erreurs, et porter un regard lucide sur l’échec de la première union est indispensable.

     

    A la fin de cette rétrospective, nous voici revenu-es à notre interrogation première :

    Comment se fait-t-il que l’Eglise catholique soit la plus inhumaine, la plus intransigeante, la plus irréaliste, en matière de « morale conjugale et sexuelle », et d’avortement ?

    Et tout d’abord, en affirmant ces positions, est elle vraiment dans le domaine de la Foi ?

    C’est ce que questionne le philosophe Francis Kaplan.*

    Dans un entretien au sujet de son ouvrage « L’embryon est il un être vivant ? » (Paris, 2008, ed du Félin), publié dans la « Quinzaine Littéraire », le philosophe rappelle les données que nous avons citées plus haut, c’est à dire la position de Thomas d’Aquin, confirmée par quatre papes successifs ( SixteV, Grégoire XIV, Pie IV, Pie V) : l’embryon ne devient un être vivant que 40 à 90 jours après la conception. Et les 90 jours correspondent à peu prés à la période d’autorisation légale de l’IVG en France. ( pour lire l’entretien complet, cliquez ici : http://www.francis-kaplan.com/entretien-embryon.html ) 

     

    Ce que Benoît XVI a reconnu, c’est que l’interdiction de l’avortement par l’Eglise ne résultait pas de raisons théologiques, mais de SON INTERPRÉTATION DE CE QUE DIT LA SCIENCE MODERNE.

    Nous voici donc dans un autre domaine, qui lui, est discutable, peut faire l’objet de débats et de controverses au fur et à mesure des découvertes…mais qui ne l’est pas, et est asséné comme un dogme invariant et figé, auquel les fidèles sont sommés d’obéir sous peine d’excommunication !

    Etablissant le distinguo nécessaire entre « être vivant » et « être un être vivant », Kaplan définit l’être vivant comme bénéficiant de fonctions vitales qui forment système ; la dégradation ou l’arrêt d’une de ces fonctions entraînant la mort, ETRE N’AYANT BESOIN D’AUCUN AUTRE POUR LE MAINTENIR EN VIE.

    Or, l’embryon n’a pratiquement aucune fonction vitale ; celles dont il a besoin pour être vivant sont celles de la mère. Ce sont les fonctions digestives, respiratoires, glycogéniques, excrétoires, de celle-ci qui lui permettent de fonctionner. Si la mère ne respire plus, ne se nourrit plus, il meurt. Ces échanges mère/fœtus sont remarquablement détaillés dans son livre.

    Il ressort comme évident que l’embryon ou le fœtus peut être considéré une partie de la mère, comme le pose le JUDAÏSME.

    Mais jusqu’à quand n’est il ABSOLUMENT PAS SUFFISAMMENT un être vivant ?

    C’est à dire sans fonction cérébrale, sans système coordonné ? Pour l’auteur, à la lumière des dernières recherches scientifiques sur lesquelles il s’appuie, la réponse est : jusqu’au terme du troisième mois. C’est à dire douze semaines. Le délai légal français pour une IVG.

     

    Ce n’est donc pas sans raison que certains et certaines ont comparé les positions de l’Eglise catholique, et de certains ultras des autres confessions, au problème rencontré par Galilée : il ne s’agit nullement de foi, mais d’interprétation de la science ; et en quoi l’Eglise est elle plus compétente que d’autres dans ce domaine, au point de vouloir imposer sa vision au monde entier ? Pour affirmer la même position répressive d’interdiction absolue de l’avortement, les protestants évangélistes invoquent eux aussi la science et la philosophie. A quel titre ?

    Cette question reste ouverte, et elle mérite qu’on se la pose.

    Les partisans de l’interdiction absolue de l’avortement pourraient être considérés comme une secte, qui non seulement ne reconnaît pas à la femme le statut d’être vivant dont le droit à la vie est intangible. Mais aussi dénie totalement l’évidence scientifique selon laquelle c’est l’organisme maternel le pourvoyeur de vie.

    Si les croyants sont tenus à certains articles de foi, ils n’ont aucune obligation de croire que la terre est plate !

     

    Michelle .C. Drouault.

     

    * Francis KAPLAN, philosophe et professeur de Philosophie ; directeur au département de Philosophie de l’Université de Tours.

    Principaux ouvrages :

    « la Passion antisémite habillée par ses idéologues » (2011)

    « l’Embryon est il un être vivant, » (2008)

    « le Paradoxe de la Vie, la biologie entre Dieu et Darwin »  « Introduction à la philosophie de la religion ».

     

     


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  • Enjeu politique, l’interruption volontaire de grossesse refait son apparition dans les débats parlementaires des pays européens : L’Espagne veut en restreindre les possibilités (mais 78% des espagnols estimeraient cette réforme non nécessaire), la Suisse, le 9 Février prochain votera sur son remboursement, ou non, par l’assurance maladie ; en France la référence à la notion de « détresse », vient d’être supprimée…

    Nous poursuivons notre enquête sur la position des religions sur ce sujet.

     

    Judaïsme et avortement

    Dans le judaïsme, l’avortement n’est pas radicalement interdit ; il n’est pas non plus autorisé sans distinction.

    C’est la « halaka » (loi juive) qui régit le statut du fœtus.

    Dans la plus part des cas, celui-ci est considéré comme une « personne », mais :

    -La Torah requiert un simple dédommagement financier pour qui provoque une fausse couche ; donc ce n’est pas un crime majeur.

    -Bien qu’il soit vu comme « une forme de meurtre », l’avortement ne requiert cependant pas la peine de mort.

    Selon le Talmud, le fœtus est « m’ayim bealma » (rien que de l’eau) pendant les 40 premiers jours.

    En règle générale, l’avortement n’est permis par la loi juive que si le fait de porter le fœtus à terme constitue une menace pour la vie de la mère.

    Il est alors considéré comme un « poursuivant » qui pourchasserait la mère pour la tuer.

    (Cette option a été posée également par des médecins catholiques libéraux lors des premières explications sur la nécessité de certains avortements thérapeutiques : le fœtus est défini comme un « agent agresseur » de la mère).

    La loi juive tient compte des facteurs psychiatriques autant que physiques dans la menace potentielle envers la mère. Son degré de souffrance émotionnelle dans le cas de viol ou d’inceste doit être pris en compte.

    La menace peut être directe ou indirecte.

    Directe : « placenta praevia »*, siège ; indirecte : diabète grave, hypertension.

    Selon la Mishna, l’enfant est partie intégrante du corps de la mère avant la naissance. Il peut alors être sacrifié pour la sauver comme n’importe quelle autre partie de son corps, (amputation, par exemple) car sa vie a priorité sur un enfant qui n’est pas né.

    Cependant, dés l’instant où le bébé est sorti du corps de la mère, les deux personnes SONT ÉQUIVALENTES. En cas de danger, on peut considérer qu’ « ils se poursuivent l’un l’autre »…. 
    Ces sont des débats posés par les experts rabbiniques.

    Dans tous les cas, la femme qui désire avorter doit soumettre son cas à un comité d’éthique.

    Les débats du judaïsme contemporain sur ces questions prennent en compte toutes les données scientifiques modernes.

    Il est reconnu par tous qu’une IVG doit être pratiquée le plus précocement possible.

    Les malformations fœtales ne sont pas en principe, un motif valable d’avortement ; mais il existe des exceptions dans le premier trimestre s’il y a difformité. (Waldenberg).

    Les débats modernes reconnaissent la rubéole de la mère, la maladie de Sachs,* le syndrome de Down (trisomie 21), comme des indications d’avortement thérapeutique, même tardivement.

    Chaque cas est unique, et particulier, et la halaka doit être examinée dans toute la complexité du problème, qui est discuté à la lumière de la médecine.

    Par exemple, un rabbin a recommandé la « pilule du lendemain » après un viol, qui lui semblait le procédé le moins traumatisant pour éviter des conséquences dramatiques.

    Un autre a autorisé une « réduction embryonnaire » après un traitement hormonal contre la stérilité, tout en reconnaissant qu’il s’agissait d’un problème douloureux.

    Notons que les juifs ultra-orthodoxes seuls ont une position qui rejoint celle de l’Eglise catholique, et estiment que la vie commence dés les premières heures de la conception.

    Il s’agit essentiellement du « Mouvement Loubavitch », et de l’Union des Rabbins orthodoxes des USA et du Canada.

    Les ultra orthodoxes présents en Israël peuvent avoir ce type de position, et il n’est pas anodin de constater que ce sont aussi des groupes favorables à des politiques très dures concernant le conflit israëlo-palestinien.

    Enfin, certains rabbins semblent ne pas désapprouver l’avortement en cas d’adultère ? On reviendrait ici à des notions de droit de l’époux assez complexes, et qui pourraient être considérées comme archaïques….

     

     A la lumière de tout ceci, nous pouvons dire en résumé que dans les autres grands monothéismes il existe un DÉBAT nourri, issu des différentes tendances et écoles de l’Islam et du Judaïsme.

    Par ailleurs, les religieux les plus progressistes essayent d’ADAPTER leurs recommandations au contexte et aux découvertes modernes.

     

    Prochainement, nous envisagerons les positions des autres chrétiens, protestants et orthodoxes.

    Car, à l’exception des protestants évangélistes, TOUS les autres chrétiens montrent plus d’ouverture, d’humanité et de miséricorde que la doctrine catholique de l’Eglise vis à vis des femmes et des couples.

    Mais les affirmations du catholicisme relèvent elles bien de la foi ?

    C’est ce que nous examinerons.

     

    Michelle DROUAULT

    *placenta praevia : anomalie de localisation du placenta, placé trop bas dans l’utérus.

    Risques : rupture et décollement du placenta(entraînant une fausse couche), hémorragies sévères, choc hémorragique (26% de mortalité maternelle), douleurs.

     

    *maladie de Sachs : maladie neuro-dégénérative entrainant une hypotonie musculaire générale, et une perte progressive de l’autonomie de l’enfant, qui décède en général entre 2 et 5 ans. On ignore pourquoi, mais cette maladie est assez répandue chez les Juifs askénases.

     

     

     

     


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  • Pendant qu’une « Femen » a mimé un avortement dans l’église de la Madeleine à Paris, suscitant réprobation et polémique, un député espagnol veut mener une « croisade européenne contre l’avortement ».

    Le débat semble aujourd’hui miné…

    L’Espagne veut modifier sa législation sur l’Interruption Volontaire de Grossesse dans un sens restrictif.

    A compter de la promulgation de la nouvelle loi si elle est votée, seules seront autorisées les IVG pour cause de danger pour la vie ou la santé de la mère ; de viol ; ou de malformation fœtale grave.

    En cas de viol, la femme (ou la fillette ??) doit avoir porté plainte.

    On comprend les organisations féministes d’avoir vigoureusement protesté contre ce « minimum humanitaire », qui ne tient aucun compte, encore une fois, du vécu des femmes et des filles.

     

    Notre cher archevêque de Grenade y serait il pour quelque chose ?

    Avant de poser cette question, il convient d’interroger l’historique de l’avortement en Espagne.

    Totalement proscrit sous le franquisme, l’avortement est devenu une « exception  légale » en 1985, sous le régime de monarchie parlementaire mis en place.

     C’est à dire qu’à ce socle de base (exception à l’interdiction dans les cas extrêmes) a été ajouté le danger pour la santé psychologique de la mère ; ce qui équivaut à des possibilités semblables à celles de la majorité des pays d’Europe (Irlande et Malte excepté).

    Cependant, il existait alors un vide juridique : si des délais sont obligatoires pour le viol et les malformations fœtales (12 semaines), il n’y en a pas lorsque la santé physique ou psychologique de la mère est menacée. Cette législation a été reconduite en 2004.

    En 2010, le gouvernement socialiste de J. Rodriguez Zapatero estime que la loi est hypocrite : dans 90% des cas, c’est la « détresse psychique » qui est invoquée, et acceptée par la commission médicale. Aussi, le Parlement promulgue une loi qui autorise l’IVG pour toutes les femmes qui en font la demande (y compris les mineures d’au moins 16 ans sans avis parental) quelles qu’en soient les raisons, DANS UN DÉLAI DE 14 SEMAINES MAXIMUM.

    Le scandale des cliniques de Barcelone accusées de pratiquer des IVG à des termes excessivement tardifs sur des bébés qui seraient nés viables, n’a sûrement pas été étranger à l’esprit cette loi.*1

    Le résultat n’est pas celui auquel s’attendaient les opposants : le nombre d’IVG a diminué de 4000 dans l’année qui a suivi ; et il est toujours en baisse.

    Aussi le gouvernement de droite (Parti Populaire) de Mariano Rajoy ne peut actuellement se targuer d’une explosion des IVG pour changer la législation !

    La plus part des observateurs s’accordent sur le constat qu’il veut surtout s’assurer une base d’électorat conservateur, en rompant systématiquement avec toutes les mesures emblématiques du gouvernement précédent. On peut par ailleurs compter à l’actif des socialistes espagnols une réduction spectaculaire de la violence conjugale grâce à des mesures énergiques qui allient protection des femmes et pénalisation des violences. Ces mesures-phares ont souvent été citées comme modèles dans d’autres démocraties européennes pour s’en inspirer. Vont- elles être abrogées ?

     

    La démographie est elle en cause ? Certes, la démographie espagnole est en berne. Rien de moins étonnant dans un pays où a sévi jusqu’il y a peu une crise économique et sociale sans précédent, obligeant certains citoyens ibériques à s’expatrier jusqu’au Maroc pour retrouver un travail décent. S’abstenir de devenir parents dans un tel cadre serait plutôt une preuve de responsabilité !

    Toutes les études économiques européennes concordent : ce qui incite les femmes à avoir des enfants, c’est le fait d’avoir elles mêmes un travail stable (c’est le travail de la mère qui protège les enfants de la misère : il assure des revenus dans la famille si le père perd son emploi), et de bénéficier de modes de garde efficients. Si la France et la Suède sont les meilleures élèves de l’Europe en matière démographique, c’est parce que l’emploi des femmes à temps plein et les équipements collectifs en corollaire sont des constantes.

    Interdire l’avortement ne sert à rien : les femmes qui ne veulent pas d’enfant, et deviennent enceintes par accident, ne leur donneront pas naissance. Elles iront à l’étranger, ou, pour les plus pauvres, se tourneront à nouveau vers des moyens de fortune parfois mortels. La mortalité des femmes par avortement clandestin dans certains pays d’Amérique Latine est considérable : cela n’accroit pas la démographie !

    Le ventre des femmes est donc bien, perpétuellement, un enjeu politique, un terrain de lutte idéologique, où leur bien-être, leur santé et leur dignité passent à la trappe.

     

    Cependant, nous nous sommes intéressées à la position vis à vis de

    l’ avortement des différentes cultures, au fil des siècles. Les religions sont elles vraiment les facteurs principaux de répression de cet acte, même lorsqu’il semble la seule solution sensée ?

     

    Dans l’introduction de leur ouvrage remarquable dont nous conseillons la lecture exhaustive (« Histoire de l’avortement, XIX/ XXème siècle » éditions du Seuil, 2003) Catherine VALENTI et Jean-Yves LE NAOUR précisent que l’attitude des civilisations de l’Antiquité, par exemple, a surtout été l’indifférence : que ce soient par les grecs et les romains, ou encore les assyriens ou les babyloniens, si l’avortement était condamné, c’était uniquement parce qu’il constituait une atteinte aux droits du mari et père, qui avait seul droit de vie et de mort sur sa famille. Un père pouvait décider de laisser mourir son enfant à la naissance, personne n’y trouvait à redire ! Et si un avortement était effectué sur son ordre, il n’était pas condamné.

    Chez les Egyptiens et les Hébreux, les textes sont muets sur la question.

    Paradoxalement, le christianisme qui paraît maintenant si patriarcal, a été la première religion à contester le pouvoir absolu des maris et pères, en affirmant le caractère sacré de tout être humain.

    Le problème principal de l’avortement résidait dans le fait qu’une « âme » soit privée de baptême, mais à partir de quand le fœtus était il « animé » ?

    Les mêmes auteurs indiquent que s’inspirant d’Aristote, selon lequel l ‘animation se produisait 40 jours après la conception pour un mâle, 90 pour un embryon femelle ( !), l’Eglise du IVème siècle, embarrassée, prononce une peine de dix ans de pénitence pour les avortées au delà de ce terme…Les excommunications ou pénitences variant de un à dix ans ont ainsi prévalu jusqu’au XVIème siècle, approuvées par les papes.

    En France, le renforcement du pouvoir royal a fait passer l’avortement sous le regard du pouvoir civil, et plus des tribunaux ecclésiastiques.

    Se pose alors une question essentielle qui va perdurer jusqu’au XIX ème siècle : comment différencier un avortement sciemment provoqué d’une fausse couche ?

    Au XVIIIème siècle, la répression est sévèrement critiquée, et la pitié pour les jeunes filles séduites, souvent contre leur gré, et obligées de recourir à l’avortement à cause de la rigidité de la société, prend le pas , même chez les religieux.

    La Révolution de 1789 ne poursuit, dans la Constitution première de 1791, que les avorteurs (20 ans de travaux forcés, tout de même), laissant la femme exempte de toute poursuite.

    Il faut donc attendre Napoléon Ier, parangon de misogynie, pour que le code pénal de 1810, dans son article 317, punisse à la fois les femmes et les avorteurs de manière très sévère.

    Mais l’idée devient alors qu’il s’agit, plus que d’une rébellion éventuelle contre l’autorité maritale, d’un crime contre les intérêts de l’Etat et du pays ; idée qui sera reprise et magnifiée par la loi de 1920, puis par le régime de Vichy.

    De possession du mari, le ventre des femmes passe à bien public à la faveur des deux conflits mondiaux…

    Néanmoins, ce seront des arguments moraux, et non politiques, que médecins traditionalistes et députés conservateurs brandiront dans les années 1860, lorsque les progrès de la médecine poseront le problème de l’avortement thérapeutique. Ils appelleront alors au secours l’Eglise catholique, qui reste évasive, recommande la plus grande circonspection, et bref, se fait tirer l’oreille…car certains théologiens ont exprimé que la vie de la mère était sacrée, et que si celle ci était en danger, le premier devoir du chrétien était de voler au secours de son prochain.

    On dit que le Saint Siège fut « poussé par des médecins plus catholiques que le Pape» (source ibid, Histoire de l’avortement), et de guerre lasse, en 1895, celui-ci promulgue une bulle qui condamne l’avortement. Le problème est que depuis 1871 -date de la bataille pour l’Unité Italienne, comme par hasard-un pape est réputé infaillible…

    En 1930, c’est la catastrophe : toutes les manœuvres abortives sont condamnées par Pie XI, Y COMPRIS celles qui sauveraient la vie de la mère. Le caractère sacré de la vie des femmes disparaît, contre toute évidence humaine et évangélique.

    Le christianisme catholique se démarque complètement du protestantisme, et de l’orthodoxie, qui jugent légitime la préservation de la santé et de la vie d’une mère qui a souvent d’autres enfants. ( En 1970, les statistiques sur les avortements clandestins prouveront que deux tiers des femmes avortées sont mariées et déjà mères de famille.)

    Le catholicisme demeure la religion la plus inhumaine pour les femmes et les familles, éloignant des milliers, voire des millions, de fidèles, puisqu’elle condamne AUSSI la contraception. Mais contrairement à l’idée reçue, il semble que ce ne soit pas l’Eglise qui ait influencé les lois civiles, mais le contraire.

     

    Qu’en est- il des autres monothéismes ?

    Nous avons examiné la position de l’Islam.

    Selon les hadiths prophétiques, un embryon « s’anime »au bout de 120 jours, c’est à dire 20 semaines, d’aménorrhée environ. L’interdiction de l’interruption de grossesse est absolue à partir de ce terme.

    Certaines écoles (les malékites ) datent l’animation au 40ème jour environ de la conception( 7/8 semaines).

    Un grand nombre de théologiens musulmans semblent s’accorder sur la première hypothèse, en citant le 4éme hadith des 40 hadiths de Nawami.

    Si l’Islam affirme lui aussi le caractère sacré de la vie, il admet le « principe de nécessité ».

    C’est à dire qu’une grossesse peut être interrompue « pour une juste cause » :

    -si la vie de la mère est menacée

    -si sa santé physique ou mentale est en danger, ou si elle est handicapée, et ne pourrait supporter la grossesse (hanafites, hanbalites)

    -si elle résulte d’un viol ou d’un inceste,

    - si le fœtus souffre d’une malformation grave.

     

    C’est le choix du moindre mal, « car la perte de la mère est une perte beaucoup plus grande que celle du fœtus(…) la vie de la mère est une réalité, celle du fœtus n’est qu’espérée ».

    Pour les hanafites, l’IVG doit absolument avoir lieu avant que les membres aient commencé à se former, et en cas de nécessité réelle et reconnue.

    Les malékites, beaucoup plus rigoureux, expriment l’interdiction totale de l’IVG depuis le début de la conception SAUF dans les 40 premiers jours, uniquement en cas de raison valable(les mêmes que les autres écoles). Pour eux, l’interdiction prend de l’ampleur au fur et à mesure du développement du fœtus.

    Sont rejetées les interruptions de la grossesse pour raisons économiques (plusieurs recommandations du Prophète), une mésentente de couple, ou-ce qui est intéressant- « le souci de l’opinion publique parce que la naissance aura lieu hors mariage ».

    Il existe de nombreux débats internes à l’Islam, entre croyants et religieux, sur ces sujets, spécialement sur internet.

    C’est ainsi qu’une internaute demandait si un mariage forcé devait être considéré comme un viol ? Nous avons ainsi appris qu’un mariage forcé n’était pas considéré comme valide par l’Islam, et sévèrement proscrit…

    La position islamique est donc beaucoup plus souple et humaine que la position catholique.

    De même l’espacement des naissances est toléré, la méthode étant laissée au choix des croyants, avec une nette préférence pour celles qui empêchent la fécondation, et non la nidation.

    Nous examinerons prochainement les positions du judaïsme, mais en conclusion, peut -on dire que c’est la domination masculine qui colonise les religions ? La question est ouverte.

     

    Michelle. C. Drouault

     

    * 1

    Un médecin péruvien installé en Catalogne, le Dr Morin, s’est mis à pratiquer des avortements jusqu’à 22 semaines d’aménorrhée ou davantage, pour des tarifs allant de 4000 à 6000 euros. Le subterfuge résidait dans de fausses évaluations psychiatriques.

    C’est une journaliste danoise, enceinte de 30 semaines, qui a fait éclater l’affaire : elle avait prétendu demander une IVG sous le prétexte d’une rupture de couple, ce qui avait été accepté

    moyennant une grosse somme.

    L’établissement a été fermé, et le médecin inculpé.

    Alors qu’une quasi perpétuité était requise contre lui, certaines sources affirment qu’il aurait été acquitté ??? Une association catholique s’était porté partie civile, faussant certainement le débat : savoir s’il est un crime de supprimer volontairement la vie d’un fœtus presque à terme sans que quiconque, mère ou enfant, ne soit en danger, et pour un but lucratif, n’est pas une question idéologique, mais humaine et citoyenne.

     

     

     


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  • Dans son homélie de Noël de 2009, Mgr Javiér Martinez Fernandez, archevêque de Grenade

     (Espagne), avait affirmé que les régimes totalitaires d’Hitler et de Staline avaient légalisé des crimes « moins répugnants »que la loi autorisant l’avortement sous certaines conditions qui allait être votée dans son pays.

    Même si nous sommes hélas habitués à ces comparaisons morbides et déplacées ; il convient de clarifier les propos de l’archevêque.

    En effet, le dernier numéro de « Courrier International » traduit un article d’un quotidien italien sur un revirement des soignants au sujet de l’interruption de grossesse, pourtant légalisée depuis 1978 !

    80% des gynécologues refuseraient de pratiquer cette intervention, se basant sur une « clause de conscience » , davantage encore dans la région de Rome.

    Il s’ensuit un nombre d’avortements illégaux(périlleux pour la santé des femmes) avoisinant le chiffre de 40 000 par an.

    Il est évident que L’Eglise tente de terrifier le corps médical et les femmes par de tels oukases.

     

    Les crimes d’Hitler et de son régime sont des crimes contre l’humanité.

    Un crime contre l’humanité consiste en un plan concerté pour éliminer une catégorie entière d’êtres humains POUR CE QU’ILS SONT(Juifs, Tziganes, Bosniaques, Tutsis, etc..).

    C’est la définition officielle.

    Les crimes du régime stalinien sont des meurtres de masse d’opposants politiques, ou supposés tels, et de leurs familles, par la déportation et l’exécution sommaire.

    Si l’idéologie amenant à ces atrocités diffère, elles sont égales en nombre et en horreur.

    Or la suppression médicale, demandée librement par une femme, d’un  embryon de moins de dix semaines situé à l’intérieur de son organisme, et n’ayant aucune autonomie en dehors de celui-ci, ni aucune conscience propre,  ne peut en aucun cas être comparable aux crimes de la Shoah.

    Seuls sont effectivement condamnables comme violences les avortements forcés pour des raisons politiques ou démographiques ; et les avortements sélectifs de fœtus féminins, que nous avons évoqués précédemment. On peut y ajouter les stérilisations forcées.

     

    Les crimes de la Shoah étaient si abominables qu’ils étaient non représentables par l’imagination ; il a fallu des films sur la libération des camps pour que le monde croie à leur véracité. Les images tournées par les nazis eux mêmes se sont avérées plus monstrueuses encore par leur distanciation inhumaine.

    Les  véritables meurtres d’enfants( l’archevêque espagnol emploie délibérément le terme « enfant », comme s’il s’agissait d’enfants de 10 ans avec une conscience et un ressenti), ce sont :

    -l’arrestation des 44 enfants d’Izieu, âgés de 4 à 13 ans, enfermés au fort de Montluc, avant d’être déportés à Drancy, puis à Auschwitz, d’où aucun ne reviendra ;*1

    -les enfants jetés vivants dans la chaux vive parce qu’il n’y avait plus de gaz ZyklonB*2

    -les enfants fusillés au bord des fosses, les bébés fusillés dans les bras de leur mère, par les « groupes mobiles d’extermination » du Reich*.3

    Une liste exhaustive est impossible.

    Dire publiquement qu’une opération médicale consentie-aussi moralement difficile qu’elle soit- est plus répugnante que ces crimes pour lesquels nous n’avons pas de mots, c’est insulter ces petites victimes, ainsi que toutes les victimes des camps d’extermination et de déportation, et des pogroms.

    C’est banaliser et relativiser leurs souffrances. Cela s’apparente à du négationnisme, et devrait être condamné comme tel.

     

    L’archevêque ne s’arrête pas là.

    La deuxième partie de son homélie avait crée le scandale :

    « Tuer un enfant sans défense, et que ce soit sa propre mère qui le fasse ! Cela donne aux garçons une décharge absolue pour abuser  sans limites du corps de la femme (…) »

    Certaines traductions tendancieuses ont présenté cette phrase comme un appel au viol.

    Non, ce n’en est pas un. Mais c’est une justification du viol. C’est la justification de la « punition » des femmes, pratiques barbares allant des coups de fouet pour avoir porté un pantalon, aux viols « correctifs « de lesbiennes, sans parler des viols systématiques comme armes de guerre, qui eux, sont des crimes contre l’humanité.

    Voici les viols de femmes avortées !

    C’est l’éternelle rengaine de la responsabilité des femmes dans les comportements des hommes : si les femmes n’étaient pas si mauvaises, elles ne seraient pas maltraitées …

     

    Un peu plus loin, pour justifier ses propos, le prélat cite l’adage du Moyen Age » seuls les couards s’attaquent aux faibles ». Mgr Martinez ferait bien se s’appliquer cet adage à lui même.

    Il est plus facile de terrifier des femmes dans une église, que de s’opposer à ceux qui commettent de véritables crimes.

    Si cet archevêque est si concerné par le respect de la vie, que ne le voyons nous courir pour demander que s’arrêtent les massacres du gouvernement  syrien de Bachar Al Assad, dont l’armée prend pour cible les enfants ? Amnesty International fait état depuis de longs mois de cas d’enfants torturés à mort, ou arrêtés dans les hôpitaux … Que fait il pour protéger ces innocents ? A-t-il fait une dénonciation publique de cet état de fait ?

     

    Il est temps que les femmes chrétiennes démystifient ce type de discours.

    Pendant que les hommes commettent des violences  incessantes dans le monde entier, dans une spirale de destruction dont nous avons bien du mal à sortir,  en luttant avec les hommes pacifistes et de bonne volonté ; ce sont les femmes qu’on accuse de crimes !! ce sont elles qu’on montre du doigt, elles qui maintiennent la vie au sein de tous les conflits, souvent au péril de la leur ; elles que l’on livre à plus de violences encore en dédouanant ceux qui les commettent !

    ASSEZ .

     

    Michelle Drouault.

     

     

    *1 P.J.Biscarat : « Les enfants d’Izieu, Avril 44, un crime contre l’humanité », Veurey Ceder,    2003

     

    *2 Témoignage de Mme Vaillant-Couturier, rescapée des camps, au procès de Nuremberg 

     

     

    *3 Raul Hilberg « La destruction des Juifs d’Europe », Fayard, 1988, (1ére édition)


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  • SAVITA HALAPPANAVAR, décédée à 27 ans en Octobre 2012 à la suite d’un refus d’avortement en Irlande ; et FENG JIAN MEI, chinoise victime d’un avortement forcé à 7 mois de grossesse, sont les deux tristes facettes d’une même évidence : nulle part en ce monde le corps des femmes n’est à elles.

    Outils de reproduction, et non êtres humains ; elles sont considérées comme de simples réceptacles. Leur contenu doit être gardé par contrainte, ou expulsé de force, au gré des idéologies, ou des planifications démographiques des pouvoirs masculins.

    Dans les deux cas, il y a eu meurtre, l’un pour non assistance à personne en danger ; et l’autre par infanticide. Mais les pouvoirs masculins dominants n’en ont cure : le corps des femmes relève du champ politique, ou du domaine politico-religieux.

    Les hommes se réservent toujours le droit de vie et de mort sur les femmes et les enfants.

    Le dire passe pour une outrance.

    Si on examine les faits, cela s’avère exact.

     

    Enceinte de 17 semaines (4 mois et une semaine), Savita s’est présentée aux urgences d’un hôpital irlandais, alors qu’elle souffrait d’hémorragie, de fièvre et de douleurs lombaires et était en train de faire une fausse couche.

    Un tel tableau pouvait faire penser d’emblée à une fausse couche par suite d’infection(listériose ou autre infection bactérienne), et aurait du, les médecins en ont convenu par la suite, être traité comme une urgence obstétricale ; c’est à dire par un curetage immédiat. Or les médecins ont refusé de mettre un terme à la grossesse sous le prétexte qu’il existait encore un rythme cardiaque fœtal.

    Le mari s’est entendu répondre qu’ils étaient dans un pays catholique.

    Quelques jours plus tard, Savita est décédée de septicémie, faute d’intervention et de soins adéquats.

    C’était une jeune femme heureuse de vivre et d’attendre ce bébé.

    Pourtant , depuis 1992, la loi Irlandaise prévoit que l’avortement peut être pratiqué lorsque la vie de la mère est en danger. Mais les décrets d’application n’ont jamais été promulgués.

    Déjà, en 2010, la Cour Européenne des Droits de L’Homme avait condamné l’Irlande pour un refus d’avortement envers une femme atteinte d’un cancer, la grossesse risquant d’aggraver son état.

    Voilà ce que recouvre le « respect de la vie ». Une posture totalement idéologique et hiérarchisée :le cœur d’un fœtus non viable a plus de poids que la santé et la vie d’une femme.

     

    Venons en à Feng Jian Mei. Cette jeune Chinoise était enceinte d’un deuxième enfant.

    Vu la politique de l’enfant unique en Chine, elle et son mari auraient du payer une amende conséquente : l’équivalent de plus de 4000 euros.

     Ils n’avaient pas cet argent.

    Alors , les agents du planning familial l’ont emmenée de force à l’hôpital, et l’ont avortée contre son gré d’un enfant de 7 mois de terme, qui serait né viable. Feng Jian Mei s’est réveillée traumatisée.

    Désespéré et révolté, son époux l’a prise en photo allongée à côté de son bébé mort dans une enveloppe de cellophane. Cette photo a fait le tour du monde, et les autorités chinoises ont du s’excuser et mener une enquête.

    Cependant, la presse britannique a révélé qu’il s’agissait de pratiques courantes.

    Les Chinoises incapables de payer l’amende essayent de se cacher, mais elles sont traquées par les agents du planning. Lorsqu’on les retrouve, leur grossesse est déjà souvent avancée, mais qu’importe ! Les impératifs socio-économiques du pays ont priorité sur leurs souffrances et la vie de leur bébé.

    Malgré une promotion certaine de la femme au travail en Chine Populaire, le pouvoir et les instances de décision demeurent majoritairement aux mains des hommes.

     

    En Inde, les politiques d’incitation à la stérilisation des hommes déjà pères dans les années 70, ont cédé le pas à la sélection de sexe.

    Ce n’est pas le pouvoir étatique qui est en cause, mais le pouvoir familial et marital. Les hommes pauvres veulent en priorité des garçons pour avoir de la main d’œuvre, les riches veulent transmettre leur nom et leur fortune.

    Ainsi , l’échographie est détournée de son but, la surveillance prénatale, pour devenir un terrible instrument d’avortement forcé des fœtus féminins.

    L’Etat est impuissant à intervenir efficacement sur ce qui devient un déséquilibre démographique inquiétant.

    Est ce vraiment un paradoxe, l’Inde héberge un business de mères porteuses en pleine expansion….

     

    En Amérique latine, les restrictions aux interruptions volontaires de grossesse sont telles que plus de quatre millions d’IVG sont pratiquées clandestinement, causant environ 1000 décès par an.

    En Amérique du Nord, l’avortement est devenu un enjeu politique ; comme l’a montré le retournement subit de Mick Romney au moment des élections présidentielles américaines.

     

    Partout, les femmes sont sectionnées, tronçonnées. La communication entre leur cerveau , leur psychisme et leur corps, bafouée et forclose.

    Objet et instrument, la femme est clivée, l’unité de son être est détruite.

    Or, le clivage du Moi rend fou, disaient en substance les psychanalystes Bergeret et Lacan…

    Les troubles mentaux résultant de toutes ces maltraitances sont certainement non-quantifiables et sous-estimés.

    Les hommes continuent à détourner les découvertes scientifiques à leur profit, et à nier celles qui les dérangent.

    Dénoncer sans relâche ces réalités, exiger le respect de nous-mêmes, est un combat de chaque jour, sur tous les continents.

    http://www.lesnouvellesnews.fr/index.php/breves/53-nouvelles-breves/2842-salvador-avortement-interdit-meme-pour-sauver-vie

     

    Michelle. C. Drouault

     

     

     

     

     

     


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  • Prises entre le marteau et l’enclume, nous voilà passées au rouleau compresseur de postures

    idéologiques qui bloquent toute recherche impartiale, et ne permettent aucune réflexion.

    Après les propos de pompier pyromane d’un archevêque, qui nous promet une société apocalyptique (à lui aussi nous pourrions demander« sommes-nous en état de siège ? »), on nous signale les propos pour le moins surprenants d’une association pour l’homoparentalité.

    Dans une rubrique de questions-réponses, à l’interrogation « deux mamans, pourquoi pas ; mais deux papas ? », il est répondu entre autres ceci, pour justifier qu’un enfant puisse avoir  deux hommes comme parents : 

    « Rappelons nous que voici quelques décennies (sic), les mères bourgeoises confiaient leurs enfants à des nourrices, sans pour autant leur porter préjudice »

    Tout d’abord, quelques décennies, cela signifie 40, au plus 50 ans en arrière. Dans les années 1960, la pratique des nourrices avait totalement disparu, si ce n’est quelques nurses à domicile dans les beaux quartiers. Mais c’est l’absence prétendue de préjudice qui nous a donné envie d’effectuer un bref rappel historique du sort des enfants mis en nourrice :

     

    L’habitude de faire élever ses jeunes enfants en nourrice dés la naissance, commence discrètement en Europe à partir du Xème siècle, pour augmenter progressivement jusqu’au XIVème siècle, où apparaissent les premiers écrits concernant cette pratique.

    Mais au XVIème siècle, beaucoup de mères allaitent encore elles mêmes leurs enfants.

    En France, le plein essor des mises en nourrice se situe au XVIIIème siècle, avec une densité maximale au XIXème siècle.

    Notre pays a été celui où cette habitude a été la plus fréquente, et aussi celui où elle a causé un véritable « gâchis de vies humaines » peu à peu dénoncé par chroniqueurs, philosophes et médecins.

    Si la cause de cette pratique a d’abord été économique, touchant les épouses d’artisans, de commerçants, de maîtres ouvriers, qui avaient besoin de continuer à travailler avec leur mari pour la survie familiale ; le phénomène a bientôt touché toutes les classes sociales : des aristocrates, occupées par une vie mondaine, en passant par les bourgeoises, qui sans doute voulaient les imiter ; les commerçantes, et jusqu’aux épouses de compagnons ; toutes les jeunes accouchées des villes ont  massivement envoyé leurs bébés en nourrice.( Précisons qu’il n’existait à l’époque aucune alternative au lait de femme)

    A cela il faut ajouter les enfants illégitimes et abandonnés, envoyés en nourrice par des hospices souvent peu regardants sur les qualités des femmes recrutées.

    « Ce qu’on a appelé l’allaitement mercenaire », nous dit Emmanuel Le Roy Ladurie dans une étude sur le sujet, « est responsable d’une véritable hécatombe. Objectivement, c’est de l’infanticide ».

     En effet, les conditions sont telles que les enfants, dans une effarante proportion, meurent. Pourquoi ?

    Plus la famille était modeste, plus l’enfant était placé loin. Un nombre important de nourrices était recruté à la campagne. Philippe Aries (L’enfant et sa famille sous l’Ancien Régime) comme Elisabeth Badinter (L’Amour en Plus) ont décrit avec réalisme les charrettes de transporteurs de bébés vers les campagnes, qui circulent été comme hiver,  en laissant tomber quelques uns au passage, les laissant exposés au froid et aux intempéries diverses. Certains enfants sont déjà morts ou mourants à l’arrivée. Les nourrices campagnardes doivent continuer à vaquer aux travaux des champs, l’enfant ne leur procure qu’un petit revenu supplémentaire, aussi, elles le pendent souvent à un crochet à l’abri des animaux, où il croupit  dans son maillot jusqu’à la prochaine tétée…partagée avec le bébé de la nourrice.

    Certaines nourrices, dites « nourrices sèches », des veuves impécunieuses, souvent, nourrissaient les enfants de sortes de bouillies administrées par le moyen d’une corne (l’ancêtre du biberon), sans aucune hygiène, et les décès par maladie ou malnutrition étaient courants. On ignorait tout, à l’époque, des besoins des nouveau-nés et des règles d’asepsie.

    On peut imaginer aussi que la séparation brutale d’avec leur mère rendait les nourrissons encore plus vulnérables.

    Cependant, Rousseau a du être témoin de ces élevages meurtriers, car dans « l’Emile », il insiste bien sur la nécessité pour les mères d’allaiter leurs propres enfants, et le plaisir qu’elles en retireront. Il évoque la continuité entre la grossesse et l’allaitement, et les bénéfices que mère et enfant peuvent tirer de ce lien. Idées révolutionnaires qui ne remportent pas grand succès !

    En 1900, la moitié des enfants de France étaient encore élevés en nourrice ; 1/3 pour les enfants de parisiens, 1 sur 10 dans les petites villes.

    Pourtant, la surmortalité des enfants chez les nourrices campagnardes (au XVIIIème siècle, on avance le chiffre de 52% d’enfants français décédés entre la naissance et 6 ans !) finit par provoquer quelque émoi : en 1874, la loi Roussel « pour la protection et la vie des enfants de moins de deux ans » institue la surveillance des nourrices.

    Au XIXème siècle, la bourgeoisie renonce à l’envoi chez des nourrices mercenaires difficiles à contrôler. On recrute alors des nourrices à domicile, bourguignonnes ou bretonnes, trouvées soit par le bureau de placement des nourrices, soit par relations.

    Pour être plus sûre, cette pratique est aussi cruelle : la nourrice est obligée d’abandonner son propre nourrisson à une autre femme, elle même allaitante, et souvent plus pauvre. Certains y ont vu à juste titre un des aspects de l’exploitation d’une classe sociale par l’autre.

    L’enfant lui aussi s’attache à cette nourrice, parfois plus qu’à sa mère ; et la voilà renvoyée chez elle dés qu’il est sevré ! Beaucoup de témoignages concordent pour donner le récit de situations douloureuses, mais tellement banalisées que les protagonistes étaient dans l’incapacité d’exprimer leur désarroi.

    Peu à peu, une meilleure connaissance des besoins de l’enfant, des mécanismes physiologiques et psychologiques de l’allaitement, puis la découverte du lait en poudre,  ramèneront les enfants dans les bras de leur mère.

    Freud a été le premier médecin à évoquer la notion de plaisir réciproque de la mère allaitante et de son bébé.

    Malheureusement, médecins hygiénistes et moralistes transformeront vite ce plaisir en devoir, enfermant les mères bourgeoises au foyer, et tentant d’y faire rentrer les ouvrières. Mais n’était-il pas concevable qu’on veuille arracher ces femmes à la condition épuisante des travailleurs des manufactures ? De cette volonté viennent les lois de 1910 sur les congés de maternité et d’allaitement des travailleuses…

    La référence aux nourrices paraît pour le moins hâtive et hasardeuse si on veut affirmer qu’une mère n’est pas indispensable ; mais c’est surtout un immense pas en arrière quant aux découvertes scientifiques et psychanalytiques sur les relations in utéro et les relations mère-enfant.

    Alors, naïveté, ignorance ; ou tentative d’escroquerie intellectuelle ?

    A vous de juger…

    Michelle.C.Drouault

     


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  • Âgée de 8 ans, Naama M..s’en allait à l’école, dans une petite commune à l’ouest de Jérusalem, lorsqu’elle a été prise à partie et insultée par des ultra-orthodoxes juifs, sous le prétexte qu’elle n’était pas habillée « modestement », c’est à dire qu’elle n’avait pas les bras et les jambes intégralement couverts. C’était en Janvier 2012.

    Cet incident a été un des déclencheurs des manifestations qui ont eu lieu voici un an à Beith Semesh, en Israël, contre les diktats des « zélotes » qui avaient commencé d’instaurer une ségrégation de sexe dans les autobus(les femmes étant reléguées à l’arrière), et veulent qu’il en soit de même dans la rue ! Ils avaient aussi proscrit toutes les annonces ou publicités montrant des images de femmes, ne fut ce qu’un visage, interdisant l’espace public aux femmes jusque dans leur représentation.

    Les manifestations ont réuni plus de trois mille personnes, y compris des pratiquants orthodoxes qui s’estimaient discrédités par des opérations dignes des talibans.

    Le gouvernement Israélien a vigoureusement condamné ces pratiques discriminatoires.

     

    Si certains ont fait allusion aux tristement célèbres talibans, l’obsession de « modestie » des tenues vestimentaires des femmes avait aussi gagné quelques popes russes fondamentalistes, comme nous l’avions mentionné sur un autre site.

    Ce chorus hétérogène de religieux vise à déresponsabiliser totalement les hommes de leurs actes, en faisant porter le poids de leurs désirs, bons et mauvais, aux seules femmes.

    En supprimant les femmes, on supprimerait les mauvaises pulsions des hommes…

    Ce raisonnement est le même que celui qui conduit aux enquêtes sur les « mœurs » des victimes de viol en Occident, et sous-tendent toujours le même axiome : impures, les femmes conduiraient les hommes au péché ou à la faute.

    Cependant, ce qui nous a paru le plus grave est la discrimination supplémentaire qui s’établit entre les enfants : une fillette n’est pas une enfant comme les autres, elle est une femme en devenir, et à ce titre soupçonnée d’être mauvaise, et ne méritant pas la protection accordée à n’importe quel enfant-être vulnérable dans toutes les sociétés.

    Car enfin, qu’est ce qui peut pousser des hommes adultes à malmener une fillette, sinon une peur irraisonnée du Mal qu’elle est censée incarner, puisqu’une enfant de cet âge est en général habillée par sa mère ?

    Si le traumatisme subi par Naama continue de me préoccuper, c’est que je pense que toutes les discriminations envers les fillettes ont les mêmes racines, même si elles sont inavouées ou inconscientes, ou encore justifiées par de soi-disant louables intentions.

    Les petites servantes d’autel du rite catholique, écartées ou déguisées et reléguées, ne sont pas si loin de la fillette d’Israël. Il y a seulement des degrés dans les brûlures qu’on leur inflige.

    Atteinte au troisième degré, Naama mettra du temps à se remettre. Les manifestations qu’elle aura vues la réconforteront peut être. Effleurées au premier degré, les jeunes catholiques françaises éprouveront le même sentiment diffus : être considérées comme mauvaises ou dangereuses pour ce qu’elles sont.

    Récemment, début 2013, certains fondamentalistes ont suggéré que les petites filles devraient être couvertes dés trois ans…..*

    Le 1er Décembre 1955 en Alabama, Rosa Parks refusait de céder sa place à un blanc, et d’aller s’asseoir à l’arrière d’un autobus, espace réservé aux « personnes de couleur ».

    Arrêtée, elle déclenchait  l’immense vague du Mouvement pour les Droits Civiques.

    Espérons que les mouvements de protestation contre ces régressions insupportables servent de locomotive à un grand mouvement de prise de conscience de la dignité de tous les êtres humains sans distinction de sexe de race ou d’ethnie, qui amène davantage de paix.

    Michelle.C.Drouault 

    * Pour suivre : une érudite juive conteste les règles édictées par des religieux sur l’habillement des fillettes et des femmes, et interroge leur cohérence :

     

    http://www.modernorthodox.fr/article-rabbanim-cessez-de-vous-occuper-de-mon-corps-par-la-rabbanite-ayelet-livazone-113974027.html

     


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  • « INTERDITS  D’ENFANTS » ?

    Une revendication bien discutable….

     

     

    Etait diffusé recemment sur une chaîne publique un docu-fiction  ainsi intitulé, inspiré d’une histoire réelle : celle d’un couple de français ayant eu recours à une mère-porteuse américaine aux Etats Unis, pour avoir des jumelles.

    Le ton est donné d’emblée, et le parti-pris, évident : ce couple est dans son droit ; et la justice française, qui lui a rappellé qu’il était hors la loi, archaïque et cruelle.

    Nous voici donc dans un film de propagande, qui évacue d’avance toutes les interrogations légitimes du spectateur.

    L’épouse est présentée comme stérile et sans utérus, en raison d’une malformation. Elle ne produit  à priori pas d’ovocytes. Avec quels ovocytes a été fécondé le sperme du père ?

    Nous ne le saurons pas.  Dans le cas d’une donneuse, cette épouse du père n’a aucun lien avec les enfants, encore moins que celle qui les a portés et leur a donné naissance.

    C’est là que le bât blesse en droit français. Jusqu’à nouvel ordre, la mère d’un enfant est  celle qui accouche de cet enfant ; et l’épouse du père peut adopter éventuellement ces enfants, mais certainement pas prétendre être leur mère.

    Le terme de mère porteuse déplait : il est à chaque fois vivement rectifié en « gestatrice » ou « gestation pour autrui ».  Cette novlangue n’empêche pas le réel, comme il est plus soft de dire « mal voyant » ou « décédé », cependant les sujets sont bien aveugles ou morts.

    La « gestatrice » justement, est peu évoquée, et son point de vue presque totalement occulté.

    C’est une mère de quatre enfants, mariée à un officier en retraite, époux soi disant enthousiaste de la générosité de sa femme.

    La fable naïve qui nous est servie est celle que l’on raconte aux enfants : Mary (la gestatrice) est une « bonne fée » qui a prêté son « sac à bébé » parce que Maman n’en avait pas !

    Ne serait ce pas la personne toute entière qui est réduite à être un « sac à bébés », et la maternité considérée comme un simple portage ? La disqualification du maternel  est ce qui menace le plus les femmes en ce moment.

    Générosité, donc ? Un silence pudique est fait sur la nature des 50 000 euros que le couple a déboursés pour cette opération. 50 000 euros, mais encore ? Voyage, certes, agence de « mères porteuses », frais de grossesse et d’accouchement ?....dédomagement, ou rémunération de Mary ? Aux USA, la rémunération de la « gestatrice «  n’est pas interdite, elle est même la norme. Il était peut être difficile d’élever quatre enfants avec une seule source de revenus, et comment trouver un emploi à quarante ans sans avoir de qualification ?

    On est en droit de s’interroger.

    Comme sur une image d’Epinal, on voit les enfants de Mary s’approcher  du ventre de leur mère, qui porte les jumelles des français. Que ressentent ces enfants ? Ont ils des craintes, des interrogations ? nous ne le saurons pas non plus.

    Le point de vue de la gestatrice, ou plutot sa motivation, est vaguement expliqué à la fin :

    Elle même et son mari sont des enfants adoptés. Mais du vécu de cette grossesse-porter deux enfants est fatigant et difficile- de la naissance, de sa relation avec son mari pendant cette période-comment ressent il que sa femme soit enceinte, mais pas de lui ?-de la séparation d’avec les bébés, nous ne saurons rien.  Rien.

    L’attention est entièrement focalisée sur le mal être  d’Elodie, et la malédiction qui pèse sur elle : la stérilité, vécue comme une infirmité honteuse.

    Nous voici dans une association qui regroupe ces malheureuses femmes.

    C’est là l’occasion d’accréditer les pires préjugés sexistes :

    Pour être une « vraie femme », une femme doit enfanter des bébés à elle, sinon, elle est infirme, incomplète , inutile….les hommes le savent bien, qui abandonnent dés qu’ils savent sa stérilité une jeune assistante sociale, pourtant belle et intelligente.

    Ainsi , on pourrait se demander si les femmes, contraintes de se conformer aux stéréotypes masculins-productrices à mammelles ou putains ?- ne sont pas prêtes à tout pour « donner » un ou des enfants à un homme, quitte à exploiter une autre femme ?

    Non seulement la question n’est pas posée, mais la jeune amie ne trouvera d’autre solution à ses maux que le suicide. Message : si vous ne légalisez pas la gestation pour autrui, vous condamnez les femmes stériles au suicide ….

    Jamais n’est remise en question cette obssession des femmes et des couples d’avoir des enfants « à soi », de les posséder en quelque sorte, et d’entrer dans la fiction juridique d’être les seuls parents à tout prix , le prix de l’invraissemblance et du déni.

    La solution de l’adoption est balayée d’un revers de main. Trop long. Nous sommes dans le domaine d’un désir qui doit être satisfait dans l’immédiat. On ne veut pas attendre, 9 mois top chrono, et abracadabra ! l’enfant surgit comme un lapin d’un chapeau, et on le porte sur son livret de famille…On ne le répétera jamais assez, tout ceci relève du fantasme, et nous sommes libres de fantasmer ; mais ce n’est réalisable qu’au prix de très grandes souffrances humaines, et c’est cela qui est condamnable.

     Qu’a l’adoption de si rebutant ?

    Pour adopter, il est nécessaire d’avoir des entretiens avec des psychiatres, des psychologues , des travailleurs sociaux, qui évaluent avec les futurs adoptants leurs capacités à accueillir un enfant. Que les critères retenus soient parfois trop rigides ou restrictifs est un autre problème.

    Ces évaluations sont indispensables dans l’interêt des enfants.

    Le système de la gestation pour autrui ne permet pas d’interroger son désir d’enfant ; il est juste une question de ressources : il suffit d’avoir les moyens de quitter temporairement sont travail , et de débourser entre 50 000 et 100 000 euros. Un simple critère de classe.

     

    Le « combat «  de notre couple-vedette se poursuit donc contre la justice française, qui persiste simplement à dire la loi : la mère de leurs petites filles est américaine, elles le sont aussi,et leur statut est dans un vide juridique qui pose problème. Les « parents » français ont enfreint la loi en voulant valider la fiction qu’ils sont les parents naturels de ces enfants.

    Or,cette justice est ridiculisée, montrée comme bornée, rigide ,inhumaine.

    Les arguments pourtant cruciaux qui leur sont opposés sur l’indisponibilité du corps humain, et la merchandisation du corps des femmes, sont énoncés par des personnages filmés en radoteurs grotesques.

    Disqualifiés d’avance.

    Rideau, la messe est dite. La « victoire » de ces parents doit être la nôtre, ou alors , nous sommes de méchants arriérés.

     

     

    Le débat qui a suivi sur le sujet de la « gestation pour autrui », tout aussi orienté, laissait une impression de malaise.

    Y étaient invitées des personnes triées sur le volet dont on a vite compris les positions favorables à la GPA ; plus deux contradicteurs, pourtant intéressants, auxquels l’animateur et ses alliés coupaient constamment la parole. Lorsque furent évoqués les drames du trafic de mères porteuses en Ukraine et en Inde, qui rentrent dans le cadre de la traite des êtres humains internationalement combattus,on a carrément essayé de les faire taire !  Et affirmer qu’on ne voyait pas de femmes riches porter des enfants pour des femmes pauvres, était indécent, et fut couvert par des bruits de voix !

    Ces personnes auraient elles eu la même attitude face au trafic d’organes ?

    Devant une telle mauvaise foi, et un tel aveuglement volontaire, on reste pantoise.

    Et inquiéte. Car le devenir de l’humanité est en jeu.

     

    Nota : la suite du débat fut heureusement plus nuancé, sur le sujet de l’homoparentalité.

    La présence de jeunes adultes élevés par des couples homosexuels, qui expliquaient avoir eu les mêmes joies et les mêmes difficultés que les autres enfants, était précieuse.

    Cependant, on ne peut que regretter ce « packaging » intellectuel qui se dessine : certains sont pour , tout-en –un, le mariage pour tous, la procréation assistée, et la gestation pour autrui ; ceux qui sont contre ces deux dernières possibilités semblent être aussi contre le mariage pour tous ? Oui, il existe une dramatique absence de  débat dépassionné sur ce que nous sommes en train de faire de L’Humain….

    Michelle Colmard-Drouault

     

     

     

     


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  • Les jugements prononcés lors du procès des viols collectifs de Créteil ont étonné la plus part des citoyens, accablé les victimes, et révolté les femmes et les associations pour les droits des femmes. C’est à juste titre. Les peines prononcées ne semblaient pas à la mesure de la gravité des faits : des crimes, commis sur des jeunes filles mineures pour certaines.

    Il ne s’agit pas de remettre en question les décisions de justice. Il est seulement nécessaire de s’interroger sur ce problème : qu’est ce que les membres des jurés populaires-et la majorité des citoyens –connaissent de la réalité du viol ?

    Les déclarations de personnalités publiques lors d’affaires de viol sont consternantes tout à la fois de bêtise et d’ignorance.  Entre ceux qui ont déclaré, au sujet de l’affaire DSK « Il n’y a pas mort d’homme »( !), le journaliste français qui a affirmé qu’il fallait une arme pour commettre un viol ; et le politicien républicain(USA) qui a prétendu, lors d’un discours de campagne, qu’il était impossible de devenir enceinte suite à un viol, parce qu’il existait un mécanisme matabolique qui l’empêchait (sic)… nous nageons certes dans le fantasme pur ; mais l’horreur du réel est évacué.

    Tout d’abord, le viol est assimilé au sexe. Ce qui est faux. Le viol est une manifestation de domination, d’assujetissement et de violence. L’erreur vient de ce que cette violence cause à son auteur une jouissance au niveau de son sexe. Mais à la victime, elle ne cause qu’humiliation, terreur, douleur intense, et traumatisme ; exactement comme la torture.

    Le fait que le viol soit devenu une arme de guerre dans certains pays devrait pourtant mettre en évidence la nature de ce crime, et lui ôter toute connotation sexuelle ou érotique.

    Malheureusement, le fait même que des jurés aient pu prêter l’oreille à l’assertion selon laquelle une des victimes « aimait ça », démontre que tout ce qui touche au vécu des femmes est encore un continent noir. Acquitterait-t-on un auteur de tortures sous le prétexte que sa ou ses victimes étaient masochistes ? Dés qu’il s’agit des femmes, les affirmations les plus absurdes, contredisant toute expérience humaine, trouvent un écho.

    Les descriptions concrètes des viols décrivent des actes de torture : pénétrations forcées vaginale, anale, fellations contraintes. On fait effraction dans le corps de la victime par tous ses orifices, de manière répétée, sans tenir compte de son refus et de ses cris.

    Lorqu’une des victimes de Créteil dit qu’elles avaient l’impression d’être de la viande, c’est exact.

    L’éducation des citoyens doit se faire dés l’école ; elle doit être aussi précise que pour les mutilations sexuelles : une femme violée a le vagin déchiré, plein d’hématomes et d’écorchures, et il peut en être de même de son anus ou de son périnée. La souffrance est intense. Cela peut rendre ultérieurement un accouchement plus douloureux.

    Les blessures psychologiques sont immenses, et durent beaucoup plus longtemps que les douleurs physiques, comme pour la torture. Elles vont de la dévalorisation au dégoût de son corps, en passant par la dépression grave et les bouffées suicidaires.

    Une des victimes décrit ce calvaire. Comment les jurés ont ils pu croire un instant qu’elle se laissait faire « par plaisir » comme le prétendent ses agresseurs ? Pourquoi alors aurait elle porté plainte ? Pourquoi a t-on attendu qu’elle ait le visage fracturé pour intervenir ?

    Cela défie toute logique, tout sens commun.

    En Inde, on a attendu « qu’il y ait mort de femme » pour réagir. Pourtant, les viols collectifs sont nombreux, mais les plaintes n’étaient jusqu’ici jamais prises en considération.

    Et la honte rejaillissait sur la femme et sa famille si le crime était dénonçé.

    Une prise de conscience de l’impérieuse necessité d’écouter la parole des femmes, et de ne plus juger les violences qui leur sont faites à l’aune de valeurs masculines misogynes, s’avère urgente et indispensable.

    Michelle.C.Drouault

     

     


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