• IVG: l'enjeu du ventre des femmes (suite)

    Enjeu politique, l’interruption volontaire de grossesse refait son apparition dans les débats parlementaires des pays européens : L’Espagne veut en restreindre les possibilités (mais 78% des espagnols estimeraient cette réforme non nécessaire), la Suisse, le 9 Février prochain votera sur son remboursement, ou non, par l’assurance maladie ; en France la référence à la notion de « détresse », vient d’être supprimée…

    Nous poursuivons notre enquête sur la position des religions sur ce sujet.

     

    Judaïsme et avortement

    Dans le judaïsme, l’avortement n’est pas radicalement interdit ; il n’est pas non plus autorisé sans distinction.

    C’est la « halaka » (loi juive) qui régit le statut du fœtus.

    Dans la plus part des cas, celui-ci est considéré comme une « personne », mais :

    -La Torah requiert un simple dédommagement financier pour qui provoque une fausse couche ; donc ce n’est pas un crime majeur.

    -Bien qu’il soit vu comme « une forme de meurtre », l’avortement ne requiert cependant pas la peine de mort.

    Selon le Talmud, le fœtus est « m’ayim bealma » (rien que de l’eau) pendant les 40 premiers jours.

    En règle générale, l’avortement n’est permis par la loi juive que si le fait de porter le fœtus à terme constitue une menace pour la vie de la mère.

    Il est alors considéré comme un « poursuivant » qui pourchasserait la mère pour la tuer.

    (Cette option a été posée également par des médecins catholiques libéraux lors des premières explications sur la nécessité de certains avortements thérapeutiques : le fœtus est défini comme un « agent agresseur » de la mère).

    La loi juive tient compte des facteurs psychiatriques autant que physiques dans la menace potentielle envers la mère. Son degré de souffrance émotionnelle dans le cas de viol ou d’inceste doit être pris en compte.

    La menace peut être directe ou indirecte.

    Directe : « placenta praevia »*, siège ; indirecte : diabète grave, hypertension.

    Selon la Mishna, l’enfant est partie intégrante du corps de la mère avant la naissance. Il peut alors être sacrifié pour la sauver comme n’importe quelle autre partie de son corps, (amputation, par exemple) car sa vie a priorité sur un enfant qui n’est pas né.

    Cependant, dés l’instant où le bébé est sorti du corps de la mère, les deux personnes SONT ÉQUIVALENTES. En cas de danger, on peut considérer qu’ « ils se poursuivent l’un l’autre »…. 
    Ces sont des débats posés par les experts rabbiniques.

    Dans tous les cas, la femme qui désire avorter doit soumettre son cas à un comité d’éthique.

    Les débats du judaïsme contemporain sur ces questions prennent en compte toutes les données scientifiques modernes.

    Il est reconnu par tous qu’une IVG doit être pratiquée le plus précocement possible.

    Les malformations fœtales ne sont pas en principe, un motif valable d’avortement ; mais il existe des exceptions dans le premier trimestre s’il y a difformité. (Waldenberg).

    Les débats modernes reconnaissent la rubéole de la mère, la maladie de Sachs,* le syndrome de Down (trisomie 21), comme des indications d’avortement thérapeutique, même tardivement.

    Chaque cas est unique, et particulier, et la halaka doit être examinée dans toute la complexité du problème, qui est discuté à la lumière de la médecine.

    Par exemple, un rabbin a recommandé la « pilule du lendemain » après un viol, qui lui semblait le procédé le moins traumatisant pour éviter des conséquences dramatiques.

    Un autre a autorisé une « réduction embryonnaire » après un traitement hormonal contre la stérilité, tout en reconnaissant qu’il s’agissait d’un problème douloureux.

    Notons que les juifs ultra-orthodoxes seuls ont une position qui rejoint celle de l’Eglise catholique, et estiment que la vie commence dés les premières heures de la conception.

    Il s’agit essentiellement du « Mouvement Loubavitch », et de l’Union des Rabbins orthodoxes des USA et du Canada.

    Les ultra orthodoxes présents en Israël peuvent avoir ce type de position, et il n’est pas anodin de constater que ce sont aussi des groupes favorables à des politiques très dures concernant le conflit israëlo-palestinien.

    Enfin, certains rabbins semblent ne pas désapprouver l’avortement en cas d’adultère ? On reviendrait ici à des notions de droit de l’époux assez complexes, et qui pourraient être considérées comme archaïques….

     

     A la lumière de tout ceci, nous pouvons dire en résumé que dans les autres grands monothéismes il existe un DÉBAT nourri, issu des différentes tendances et écoles de l’Islam et du Judaïsme.

    Par ailleurs, les religieux les plus progressistes essayent d’ADAPTER leurs recommandations au contexte et aux découvertes modernes.

     

    Prochainement, nous envisagerons les positions des autres chrétiens, protestants et orthodoxes.

    Car, à l’exception des protestants évangélistes, TOUS les autres chrétiens montrent plus d’ouverture, d’humanité et de miséricorde que la doctrine catholique de l’Eglise vis à vis des femmes et des couples.

    Mais les affirmations du catholicisme relèvent elles bien de la foi ?

    C’est ce que nous examinerons.

     

    Michelle DROUAULT

    *placenta praevia : anomalie de localisation du placenta, placé trop bas dans l’utérus.

    Risques : rupture et décollement du placenta(entraînant une fausse couche), hémorragies sévères, choc hémorragique (26% de mortalité maternelle), douleurs.

     

    *maladie de Sachs : maladie neuro-dégénérative entrainant une hypotonie musculaire générale, et une perte progressive de l’autonomie de l’enfant, qui décède en général entre 2 et 5 ans. On ignore pourquoi, mais cette maladie est assez répandue chez les Juifs askénases.

     

     

     

     


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