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LA VIE ET RIEN D’AUTRE ?
Y a-t-il des morts acceptables ? la question semble incongrue, et même choquante.
Cependant l’actualité et les opinions parfois exprimées dans les média et sur les réseaux sociaux nous obligent à la poser.
Dés la première vague de Covid, les sceptiques sur l’utilité des gestes barrière et des protections ont avancé l’idée que la majorité des victimes étant très âgées, elles seraient mortes de toutes façons dans un délai d’un an ou deux…
Seule une jeunesse inconsciente et égoïste pouvait sans doute les empêcher de mesurer ce que cet « un an ou deux « signifiait pour les intéressés : encore un Noël, un anniversaire à passer prés d’un conjoint chéri, à parler avec ses enfants, même d’un peu loin…
Ces jeunes étaient ils des électrons libres sans famille ? n’avaient ils rien retiré de la présence et de la transmission des « anciens » pour les considérer comme négligeables ?
Mais surtout, quel manque total d’empathie, d’humanité, quel délitement du lien social se dessinait là ! Voir les vieillards en inutiles après avoir travaillé toute leur vie et mis au monde les générations futures.
Ces vies ont été jugées peu dignes de continuer à être vécues.
Le non respect des vieillards a été une des caractéristiques du nazisme dés ses débuts, qui a humilié et frappé des juifs/ves âgés ou opposants politiques, les a déportés même sur des brancards. On m’objectera qu’il n’existe pas de commune mesure entre ces propos inconsidérés et le national-socialisme. A première vue non. Mais l’idéologie sous-jacente est similaire :s’arroger le droit de juger qui doit vivre qui doit mourir.
Actuellement, on a l’impression pénible que la gestion souvent incohérente de la crise sanitaire est davantage ressentie comme mauvaise en raison de l’interdiction des activités de loisirs, que parce qu’elle fait 300 morts par jour, soit l’équivalent d’un crash aérien.
Ou bien sont ce les media qui sur-diffusent ce type d’opinion ?
Les autres morts rendues acceptables pour l’opinion publique sont les migrants morts en mer pour tenter d’échapper à la misère, la guerre civile, le terrorisme et l’esclavagisme.
Le déni de l’Europe dans son ensemble est criminel. Les morts se chiffrent par milliers chaque année dans une Méditerranée devenue un cimetière.
130 migrants ont péri la semaine dernière faute de secours des pays côtiers pourtant alertés.
Malgré sa diligence, le bateau de l’ONG « Open Arms » est arrivé trop tard…
Le pape François a considéré cet épisode comme une honte pour l’Europe.
Y a t-il eu une commémoration publique pour ces anonymes ? Valent ils moins que les victimes d’attentats ?
C’est la valeur de la vie humaine qui est ici sans cesse remise en question, et si cela continue nous pouvons tous devenir en danger, car faisant soudain partie de la catégorie considérée comme « négligeable » ou « indésirable ».
Malgré l’incessant et courageux combat d’organisations féministes, les femmes continuent également de mourir tuées par leur conjoint ou ex-conjoint dans l’indifférence générale, à raison d’1 tous les 2 jours et demi. Les confinements ont augmenté les nombre de victimes par rapport aux années précédentes.
Ces femmes sont de tous âges : la plus jeune avait 19 ans, la plus âgée 85. Et de toutes conditions.
Les justifications sont toujours là : les jeunes sont tuées en raison d’une jalousie soi disant incontrôlable, ou simplement parce qu’elles voulaient rompre une relation.
Les plus âgées, devenues malades ou invalides, deviennent un fardeau.
Des hommes décident encore une fois de leur droit à vivre.
Je ne voudrais pas oublier les morts de la rue, dont l’organisation du même nom fait chaque année le décompte, tués par un déficit chronique de politiques sociales.
Le Covid a été particulièrement meurtrier pour les sans-abri. Il est d’ailleurs stupéfiant qu’une des premières mesures n’ait pas été de mettre ces personnes en sécurité afin d’éviter parmi elles/eux dont la santé est déjà mauvaise, des contaminations massives.
« Ils seraient morts de toutes façons », rediraient certains ? Oui, l’espérance de vie dans la rue est faible : 50 ans environ…
Enfin, j’ai été frappée dernièrement par la rapidité avec laquelle est envisagée par nos contemporains la mort comme solution, avant même de tout faire pour l’éviter.
L’épidémie n’a pas empêché l’euthanasie de revenir dans le débat public, alors que des milliers de personnes mouraient sans avoir rien demandé.
Si la crainte de la souffrance et de la mort est normale et légitime, avant de parler d’euthanasie pour les cas les plus dramatiques et sans issue , nous ne devons pas oublier que les soins palliatifs en France ne sont pas développés, ou très peu, et que la recherche en la matière est la parente pauvre de la médecine.
De nombreux médecins expliquent que les patients ne veulent pas mourir, mais seulement ne plus souffrir. N’est ce pas une urgence que de traiter la douleur ? J’ai eu plusieurs témoignages proches de personnes aux prises avec des douleurs chroniques insuffisamment traitées, épuisées et manquant de sommeil. Ne cesse-t-on pas alors d’avoir envie de vivre ?
La course aux délais de l’IVG m’a tout autant navrée. Ce n’était pas l’objectif de la loi Veil de sans cesse rallonger le nombre de semaines pendant lesquelles une interruption volontaire est possible.
Cette course folle signifie qu’il n’y a là encore aucune prévention.
Education à la responsabilité, la sexualité et la contraception à l’école ? au respect entre les sexes et au consentement ? En principe 2 séances par an à partir du collège(ce qui est déjà dérisoire) mais non appliqué !
Etudes pour connaître les raisons des IVG, et comment faire baisser leur nombre ? on n’en connaît pas de fiable.
La France serait elle un pays où on ne sait pas prévenir ? Où on préfère trancher dans le vif ?
Me poser toutes ces questions me laisse dans une certaine intranquilité.
Ne regardons pas les siècles passés comme barbares : le respect de la vie n’est pas à présent plus fort qu’alors…
Michelle .C.DROUAULT
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